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10 juin 2024 1 10 /06 /juin /2024 08:04

Lecture réservée à un public averti !
Avoir beaucoup d’humour est fortement conseillé !
Toute ressemblance avec des personnes ayant existé serait totalement fortuite !

Ed. Albine Micheline

                                                      INTRODUCTION
Galvanisé par mon premier week-end choc trail en mai 2023, courant janvier après les fêtes de fin d’année, période des idées de bonnes résolutions à la « con », je me dis pourquoi pas un second stage cette année ! Je retrouve les coordonnées du tour opérator de l’an dernier.

Je fais un comparatif avec les autres, il demeure toujours le moins cher.
Bon c’est parti, cette année il est proposé un wee-kend de 3 jours, toujours dans le Cantal mais cette fois ci au pied du Puy de Sancy. Le récit est toujours aussi captivant et le programme sans surprise par rapport à celui de l’an dernier. Je fais un virement de 1 000 €. Augmentation de 25%. La guerre en Ukraine et le réchauffement climatique en sont sûrement la cause.

Depuis l’an dernier, j’ai fait quelques courses et suivi des programmes de préparation.

Mais mon plus cette année c’est que j’ai des blessures de trailers : chevilles en vrac et épaule en bouillie. Je vais pouvoir participer aux discussions de proprioception, d’ostéopathie et PPG.

Il y a un an je ne savais même pas qu’il s’agissait de termes de la langue française.

Même timing, à J-7, je reçois un mail de "Kiki Yoda" intitulé liste de matériels obligatoires. J’ouvre le document et cette année tous les mots me sont familiers hormis yaktrax. Je recherche sur le net et je lis : crampons chaîne à neige et glace. J’achète ce truc, tout en me disant intérieurement que ce doit être une erreur de copier-coller avec sa liste de matériels pour l’ascension du Mont Blanc. Et encore 30 € dans le budget. Je vais finir par me faire virer par ma compagne si je continue à dilapider les économies du ménage. Tout ça pour tester mes capacités de trailer "Montagnard". Je prends alors conscience de la chance que j’ai.

J-1, je fais mon sac et le tour opérator me contacte. Il m’indique que nous sommes un petit groupe à partir de Poitiers et qu’ils nous ont réservé un minibus pour le voyage. Le chauffeur est malade et l’opérateur me demande si je veux bien véhiculer tout le monde jusqu’à destination. J’accepte bien volontiers. Cela me permettra peut-être de mieux m’intégrer dans le groupe. Il me donne les instructions, où récupérer les clés et le véhicule et me transmet le listing alphabétique des personnes qui seront avec moi dans le minibus. Je regarde brièvement la liste et je m’aperçois que mon nom ne figure pas en tête de liste. Je reconnais ce nom. Il s’agit de Malek le kabyle, que j’avais rencontré l’an dernier lors de mon premier stage. Je m’interroge néanmoins : Mais pourquoi ne lui ont-ils pas confié les clés du minibus ???

                                                                     JOUR 1

Le vendredi 3 mai, je me présente à 7h45 au rendez-vous convenu avec le minibus. Au fur et à mesure, 7 autres personnes arrivent avec leurs bagages. Parmi eux, du stage de l’an dernier, je reconnais Kiki Yoda, Malek le kabyle, Jo l’éclaireur, Olive et Chiffounette. Jo arrive avec tout son attirail d’éclaireur : haches, longue vue, jumelles, télescopes, arcs, fusils…La moitié du coffre est réservé à ses affaires. Nous faisons les présentations avec les 2 autres personnes : Olivier un taiseux très discret et une jeune fille très fraîche nommée Jeanne. Pourvu que nous n’ayons pas le même traceur que l’an dernier, il va la bouffer tout cru.
Départ à 8h. Pour l’instant tout est ok. A l’approche de l’A20, j’émets la volonté de prendre l’autoroute. Initiative réfutée, nous prenons direction Guéret. Nous faisons une pause au bout de 2h de trajet. Je reçois comme la veille un appel du tour opérator. « Allo, Régis de Operator trail, un participant de dernière minute au stage arrive de Paris à la gare du Mont Dore vers 12h25. Il faudrait que vous le récupériez avant de monter à l’auberge de jeunesse ». Ni merci, ni merde, Régis raccroche avant que j’ai eu le temps de lui répondre. Cela commence, j’en tiendrai compte dans mon avis final de fin de stage.
J’expose les faits à mes compagnons de voyage et Malek se propose de conduire le minibus jusqu’à destination. Comme quoi, les a priori de Opérator Trail étaient non fondés. Nous arrivons à la gare du Mont Dore vers 12h10. Le début de la première sortie trail est prévue dans le programme à 14h. Afin de ne pas être trop pressé avec notre installation et nos équipements respectifs, nous décidons de prendre notre déjeuner du midi en attendant ce dernier trailer. Son bus arrive à 12h45 au lieu de 12h25. Nous avons bien fait de prendre cette initiative. Nous arrivons à destination à 13h. Nous y retrouvons Fabienne, Rénald, Greg déjà présents l’an dernier et une nouvelle prénommée Oksana. Wills, un corrézien, est également arrivé – voiture HS, elle a déjà été récupérée par un garagiste pour diagnostic. Oh punaise, je crois reconnaître au loin cette silhouette – le traceur. Surtout ne pas le contredire – dire toujours oui !

Nous nous installons dans les chambrées comme nous le souhaitons. Yoda nous donne rendez-vous à 14h pour le départ de la 1ere demi-journée de stage. Je m’installe dans la première chambre libre en bas d’un lit superposé proche de la fenêtre et du radiateur.
Rénald et Olivier s’installent à l’étage. Wills est également installé avec nous. Il demeure 2 couchages de libre. J’entends une grosse voix derrière moi : « ce lit est libre ? ». Je ne me retourne pas, je l‘ai reconnu et je réponds : "Oui". Il s’installe au-dessus de mon couchage.
Mon stress est déjà à son maximum. Je me prépare pour 14h. Dehors par la fenêtre, je vois la neige sur les sommets. Je prends des affaires chaudes : gants, bonnet, pantalon, veste chaude et textile technique…Je vois que personne ne prend les chaînes. Je fais comme eux, je ne m’embarrasse pas…on verra bien demain. 13h45, je suis au point de rendez-vous. Nico, le fils du traceur arrive tranquille…c’est rassurant, il est très à l’écoute et veille à la bonne avancée du groupe. Un grand barbu est également là – look bûcheron – avec des mains et des pieds gigantesques. Il se nomme Manu. Mon 1er  sentiment – à classer dans la même catégorie que le traceur. Comme l’an dernier, photo obligatoire avec le tee-shirt Opérator Trail. Il n’est pas fou Yoda le filou – de la bonne pub pour son business. Je connais donc déjà la grande majorité des présents. Seuls Christophe le parisien, la petite Jeanne, Oksana et Manu le bûcheron n’étaient pas présents l’an dernier.

 

Vendredi après midi ; Départ 1ère sortie

Go, c’est parti pour 3h. Nico mène le groupe. Après 10 mn de parcours roulant, 1er passage de gué et hop un pied dans l’eau. Le chemin se rétrécit et c’est le début de la montée vers le Roc de Cuzeau. Les premiers passages enneigés arrivent vite et le parcours devient de plus en plus glissant. Après 30mn de montée, à un croisement de chemins, Yoda nous fait une situation topographique : à droite direction le Roc de Cuzeau, à gauche direction la Grande Cascade.
Nous continuons notre chemin vers la droite. Le temps s’est dégradé – brouillard, grésil et neiges de plus en plus présentes. Par endroit, nous nous enfonçons de 30 cm. Le programme c’est le programme, nous continuons à avancer. A chaque stop, nous recherchons des endroits où nous pouvons nous abriter du vent. Nous arrivons au Puy de Cacadogne.

Le temps se dégrade. Qu’est-ce que l’on fait on continue, on rebrousse chemin ? Nico prudent, propose de faire demi-tour et prendre des sentiers moins enneigés et plus abrités. Yoda s’interroge, le Sancy n’est qu’à 400 m. La prise de décision commune est prise, nous continuons sur le parcours initial. Au bout de 15mn grosse surprise, le temps vire au beau avec un grand soleil. Nous redescendons sur les pistes de ski. Il n’y a plus de chemins, que de la neige immaculée. La descente est agréable, de grandes enjambées avec quelques chutes sans dommage. L’objectif – le sommet du Puy de Sancy.

Plus de chemins, droit dans la pente. On s’enfonce et le traceur nous dit… « Allez en avant, que du plaisir ». Personne ne bronche, ok, on va faire comme si…Nous arrivons à hauteur de l’arrivée du téléphérique et continuons à monter sur les marches boisées. Beaucoup de passages enneigés, mais cela passe. Nous arrivons au sommet, la vue est belle – prise de photos et nous redescendons. De retour au téléphérique, questionnements : descente par les pistes ou passage côté téléphérique. 2 groupes se forment : les plus téméraires côté téléphérique, les plus prudents sur l’autre chemin. Côté téléphérique, la pente est bien pentue et enneigée. Un petit groupe s’y aventure. Descendre sans prise de risque, c’est agréable, surtout pour moi.

Yoda et son groupe nous attendent un peu plus bas et prennent des photos de nos descentes. Le temps devient menaçant, il nous faut descendre au plus vite. La décision est prise nous redescendrons par les pistes. Dans la descente nous retrouvons vite le chemin pierreux. Frustrés de ne pas avoir trop couru, les plus vaillants lâchent les chevaux. Pour ma part, je cours tout en restant très prudent. Méfiage, il y a énormément de cailloux. J’arrive au départ des pistes. Sur ma droite, sur une partie herbée gorgée d’eau je ressens un grand souffle d’air. Tout en courant, je tourne la tête sur la droite et je vois le traceur prendre son envol. Il est en position aérodynamique, il ne touche plus le sol, il termine son 2ème salto quand surgit une faute de positionnement du corps - atterrissage sur les fesses, rebond et il continue sa course.
Compétent, le gars ! Il est surhumain. La descente se fait tranquillement jusqu’au parking.
Arrivés en bas, les premiers repartent pour chercher les derniers. En le croisant, j’ose m’enquérir des suites de sa chute et il me répond : « Ce n’est rien, que du plaisir ! ». Ok, à sa place, j’aurai eu une triple fracture du coccyx avec déplacement des vertèbres et lui il continue à courir. Arrivé en bas, je fais comme les autres, je remonte pour aller à l’encontre des derniers. Chiffounette arrive avec le sourire et nous lui faisons une haie honneur. Pour l’instant, tout va bien. Nous redescendons et en bas des pistes sur la droite, nous prenons un chemin en faux plat montant. En tête, Yoda – il doit avoir une idée derrière la tête. Au bout de 300 m parcourus, certains s’enquièrent du groupe. Il manquerait 4-5 individus dont Chiffounette. Petit conciliabule, l’auberge de jeunesse n’étant qu’à 400m, nous concluons qu’ils y sont rentrés.
Au bout du chemin, les premiers auraient vu la bête du Gévaudan – cela reste à prouver. Yoda scrute sa montre et nous dit, on monte droit dans la pente. Sans broncher, nous nous exécutons et nous grimpons. Il commence à neiger…certains se questionnent : jusqu’où allons-nous ? Yoda, nous indique par un simple geste de la main : on continue. Le groupe s’étire.

Après une vingtaine de minutes…Yoda nous dit : STOP, on redescend. Tout le monde s’exécute. Sur la descente, nous avons la neige en plein visage. Elle tombe de plus en plus fort. Wills le corrézien est en grande forme, il descend à une allure grand V et arrive le premier à l’auberge. En 5mn, tout le monde est de retour. Je regarde ma montre 13 km et 1000 m de D+. Le programme est partiellement respecté. Vu l’enneigement des cimes, nous n’avons pas pu faire le kilométrage prévu mais par contre Yoda a respecté le dénivelé. Je croise Greg qui me demande où nous étions. Je lui raconte le final de notre parcours et lui me rapporte ce que la plupart n’ont pas vu. Chiffounette, dans un élan d’euphorie, a tenté la figure acrobatique du traceur. Résultat mauvaise réception et grosse entorse. Mince, glaçage, on verra bien comment cela évolue dans la nuit. La neige continue de tomber. Les parties herbées sont désormais toute enneigées.


Maintenant opérations : douche – séchage des affaires et faire son lit. Rdv 18h45 en bas pour un petit apéro. Je descends à l’horaire annoncé. Un petit groupe est déjà installé. Sur la table je vois des packs de bières, des bouteilles de vin et de quoi se restaurer. C’est l’occasion de se raconter la journée et de souder le groupe. A côté de nous, une autre ambiance, un autre tour opérator concurrent de celui de Yoda a regroupé une trentaine de coureurs. A l’issue de leur journée, il leur est présenté via un diaporama des conseils de préparation physique, de nutrition, de récupération. Ces participants scrutent notre méthode de récup : bières, saucissons et chips – ils semblent envieux. L’ambiance de notre groupe est excellente. Les nouveaux sont bien intégrés. Je ne vois pas le bûcheron – il est redescendu sur le Mont Dore retrouver sa petite famille. J’apprendrai à mieux le connaître demain. Sur l’ardoise de la salle de restauration il est indiqué le menu du soir : Ce sera rougail saucisse – le plat signature de la Réunion où Yoda se rend a minima 1 fois tous les ans. Quelle déception ! Nous évitons de justesse la perte de Yoda. Il manque de s’étouffer à la première bouchée de ce ragoût de saucisses. Ouf, nous aurions bien été ennuyés de le voir nous quitter. Wills le corrézien reçoit des nouvelles pas très encourageantes de son assureur – son véhicule est rapatrié en Corrèze et un taxi le ramène samedi dans l’après midi à son domicile. Le week-end va lui coûter cher. En effet le contrat que nous avons signé avec Opérator Trail indique qu’aucun remboursement même partiel ne sera effectué hormis dans les conditions suivantes : le décès, l’amputation d’un membre ou l’ouverture d’une procédure de divorce (!!! ). Les organismes sont bien fatigués à l’issue de cette première demi-journée. Demain petit déjeuner pour 8h et départ 9h.                                                           

                                                                               JOUR 2

Réveil à 7h30. Il y a eu du vent toute la nuit, la neige a partiellement fondu mais le brouillard sur les cimes est bien persistant. Petit déjeuner 7h45. Un personnel de l’auberge nous a accordé l’accès à la salle de restauration avant l’heure au grand dam du gérant de l’établissement. Vu les conditions climatiques, ce matin nous allons rester à des altitudes raisonnables afin d’éviter les passages enneigés. L’entorse de Chiffounette n’a pas bien évolué dans la nuit – sa cheville est encore bien gonflée et vire au bleu. Au sein des 3 motifs de remboursement, quel sera son choix : l’amputation ou le divorce ? Le grand Manu « le bûcheron » est le 1 er tout sourire au rendez-vous. Ce temps est une aubaine pour lui. Nous récupérons ce matin Anne et Eric arrivés tard dans la soirée. Avant le départ, on n’échappe pas à la photo traditionnelle.


C’est parti, sous la pluie, direction le Roc de Cuzeau. La pluie a fait fondre beaucoup de neige. Nous arrivons à la bifurcation d’hier après midi et tournons à gauche pour descendre vers la Grande Cascade du Mont Dore. Les plus hardis se lâchent pendant que les moins téméraires essaient de garder leur équilibre. La neige ayant laissé place à un sol boueux très glissant. Dans ces conditions, Oksana semble moins à l’aise que la petite Jeannette qui évolue dans ce milieu hostile telle une chevrette. La première étant rassurée par le groupe, pendant que l’autre s’émerveille de chaque instant malgré le mauvais temps. Olivier et Manu commencent leur travail de rassemblement des troupes. Au bout de 15mn, tout le monde est présent au panoramique de la cascade. Certains prennent des photos puis nous abordons la descente en lacets jusqu’à l’entrée du Mont Dore. Nous faisons une petite pause sous un kiosque proche des Thermes – prise de barres et boissons énergétiques.  Nous sommes à

l‘abri et une personne du groupe – je soupçonne Malek mais sans certitude – lance un défi à Jeanne : « Cap ou pas cap de rentrer dans la boite à livres ». Cette dernière, naïve, s’exécute et bien entendu Mr le kabyle l’enferme dans cette boîte. La pauvre petite ! Quand le traceur va s’y mettre, cela va être une boucherie.
Nous repartons et descendons vers la gare désaffectée du Mont Dore. Le GPS de Nico donne des signes de fatigue et c’est Olive le malicieux et Greg le baroudeur qui nous guident vers la source d’eau chaude au pied du lit de la Dordogne. La plupart y vont de leur petite photo souvenir. Rénald le chimiste et Malek le kabyle s’y attardant plus que les autres. Rénald pour des prélèvements pour des analyses au sein de son labo et Malek pour des incantations étranges. A posteriori, j’ai effectué des recherches sur les croyances kabyles et j’y ai lu que le prophète Mustapha prônait pour les hommes des bains de source d’eau chaude : Ils auraient des bienfaits sur la fertilité après 50 ans !!!

Source d'eau chaude

A la suite de ce énième arrêt, nous repartons et engageons la montée vers le Pic du Capucin. Elle se fait en sous-bois à l’abri partiel de la pluie. Nous arrivons sur un plateau où le vent important nous fouette le visage. Certains sont en short, dont le traceur qui a celui le plus court. Sa maxime depuis ce matin : « Que du plaisir ! ». Discussion entre Nico et Yoda sur la suite de la sortie. Nous montons au Capucin malgré la présence d’un brouillard de plus en plus épais. Arrivé en haut, la vue panoramique est nulle. Je soupçonne que ce passage ayant duré 10mn n’était l’occasion que d’être en accord avec le dénivelé souhaité de la sortie. Aussitôt au sommet,  nous redescendons et courons sur un plateau herbé en faux plat montant. Le vent est si fort et cinglant avec la pluie, que notre avancée semble s’effectuer en marchant. Nous arrivons au bout de ce faux plat à un passage boisé où nous en profitons pour nous abriter et nous restaurer. Nous attendons les moins rapides. Le respect d’autrui dans ce groupe est exemplaire. Pour ma part je suis trempé, vivement le retour au bercail. Nous repartons sur une centaine de mètres sous les bois, et engageons en mono trace, la descente vers le chemin du retour. Nous sommes à la queue leu leu et devant moi je suis Manu le bûcheron. Il semble très à l’aise, et à une distance respectable je prends sa trace. Il me semble qu’il force ses appuis afin d’aider les descendeurs médiocres comme moi. Que nenni ! je réalise après dissipation du brouillard qu’il porte des péniches aux pieds d’où sa stabilité déconcertante. Il doit à minima chausser du « 50-12 ». Olivier le discret ainsi que le traceur continuent d’accompagner Oksana qui se retient dans ses mouvements sur cette descente technique et boueuse. Finalement, il est sympa le traceur. Au même titre que le jugement d’Opérator trail envers Malek et que ma personne envers le traceur, les jugements d’a priori sont le plus souvent non fondés. Une leçon à retenir mon Francky !
Nous attendons qu’Oksana récupère de sa descente et nous engageons la remontée vers notre auberge via les pistes de ski. A la sortie d’une partie boisée, nous finissons face au vent et à la pluie. Les organismes commencent à fatiguer et cette dernière partie est interminable. Nous arrivons à destination aux compte-gouttes, trempés. Je regarde ma montre 18.5 km et 950m de D+. Il est 12h30. Le départ cet après-midi pour la 3ème demi-journée est prévue à 14h.
Frigorifiés, nous nous changeons et essayons de nous réchauffer du mieux que l’on peut. Jo l’éclaireur est transi de froid. Pas un temps à mettre un Indien dehors – va-t-il repartir cet après- midi ? Le traceur est également dans l’expectative. Son expression depuis le début du stage "Que du plaisir" ! » a pris du plomb dans l’aile. La participation de Wills le Corrézien s’arrête là.
Un taxi le récupère à 14h pour le ramener chez lui. Il aura fait 2 sorties pour un total d’une trentaine de km à 1 000 €. Cela fait cher du km ?
Le propriétaire de l’auberge nous a préparé pour ce midi un repas froid, en mode pique-nique. Nos organismes avaleraient n’importe quoi pour reprendre de l’énergie après cette matinée apocalyptique. Et c’est bien n’importe quoi que nous ingérons ce midi. Les langues se délient : Qu’est-ce que tu fais ? tu repars, tu ne repars pas ?

Cascade de Queureuilh

Au rendez-vous de reprise de 14h, tout le monde est présent. Le rituel de la photo passé, nous partons en mode « rien à foutre, j’ai payé pour en chier, j’irai jusqu’au bout » jusqu’au village du Mont Dore. Nico a construit la trace pour une sortie allégée de 15km. Nous arrivons au même point où ce matin son Gps a lâché.
Olive et Greg prennent alors le groupe en main et nous mènent vers la Cascade Queureuilh. Nico prend du recul et vient s’enquérir des personnes en difficulté. Je lui demande : « C’est encore loin la cascade ? ». Il me répond « j’ai lâché le circuit initial depuis un bon moment, nous nous en sommes déjà fortement éloigné ». J’espère que la doublette de traceurs néophytes, connaît bien le site. J’émets des doutes mais je les suis. Nous repartons vers une seconde cascade nommée Rossignolet. Après quelques minutes de course, Yoda se rend compte qu’il a oublié ses bâtons à la précédente cascade. Il rebrousse chemin, les récupère et nous rejoint. Il a la santé le bonhomme. Nous arrivons à cette cascade Rossignolet à la forme caractéristique d’un dôme. Encore des photos – il me semble n’avoir fait que des shoots photos durant ces 2 jours. Yoda en profite pour poser avec toutes les filles. Il est dans son élément, il est heureux !

Cascade du Rossignolet


Un énième conciliabule. Les traceurs néophytes indécis prennent l’avis de Nico, sur la distance restant à parcourir si l’on récupère le tracé initial. Trop long ! Nous reprenons la direction de la station du Mont Dore. Nous contournons le village par un chemin interminable en faux plat montant et boueux. Nous sommes sur les hauteurs du village où nous faisons un arrêt pour attendre tout le monde. Nous descendons vers la station en empruntant une portion de route bitumée. A la sortie du village, il est aux environs de 16h45, il commence à bien pleuvoir et nous débutons la remontée vers notre auberge via une portion mi route mi-chemin. Le groupe
s’est éparpillé, je me cale dans les traces de Yoda, Eric, Anne et Jo l’éclaireur. Ce dernier commence à avoir quelques signes de fatigue. Il ne semble pas très copain avec le bitume et les grandes portions courues. C’est un esthète des pics rocheux. La pluie redouble d’intensité. Nous avons le vent de face. Chacun est dans sa bulle, personne ne bronche. Le mental prend le dessus sur le physique. Jo s’arrête pour se changer à l’abri. Un petit : « ça va ? » en passant à sa hauteur. Il acquiesce d’un mouvement de tête. Je continue, je reconnais le même final que ce matin. Les premiers nous font signe de regarder sur la droite. Il pleut, vent de face, je tourne la tête et aperçoit à 500 m en hauteur une forme musculeuse à l’arrêt. Je me remets en position face au vent, et j’attaque la dernière partie pentue avant l’arrivée à l’auberge. En marchant je rassemble mes esprits et essaie d’analyser ce que pourrait être cette masse vue il y 5mn. Faute de repère, j’en conclus qu’il se pourrait que ce soit la bête du Gévaudan que certains ont vu hier.

Cascade du Rossignolet

Les premiers courent face au vent. Je suis trempé, à la limite de l’hypothermie et je finis cette dernière partie en marchant. Yes, j’aperçois l’auberge, je vais pouvoir enfin me réchauffer. Dans le sas d’arrivée, il ne reste plus grand monde. Fabienne, la guerrière est là, frigorifiée, mais au contraire de moi, elle a fini en courant. Manu, le bûcheron, a un p’tit mot de réconfort, c’est sympa. Jo arrive enfin, livide. Et Yoda surgit de nulle part - Pas un pet de jeu. Il a continué un peu plus que tout le monde. Il devait sur sa montre soit lui manquer des km soit du dénivelé. Cette journée compliquée au niveau météo est terminée. A la douche ! Qu’est ce qui nous attend demain ? Je monte me changer, les étendoirs et radiateurs sont pris d’assaut. Nous avons pris cher aujourd’hui. Nico se change rapidement. Il rentre ce soir chez luiau pied du Puy Mary. Il était rassurant dans les tracés. Qui va s’y coller demain ? Cela commence à m’inquiéter. J’espère que ce ne sera pas les 2 rigolos du jour. Il était prévu, une sortie de 2h30 à 3h pour 15km. Au final 18km pour 3h15. Dans ces conditions climatiques, le surplus compte triple. Je me déshabille rapidement afin d’aller me doucher. Proche de la fenêtre, je jette un coup d’œil dehors et j’y vois Olivier le réservé en train de barboter dans la rivière jouxtant l’auberge. La température extérieure doit être de 8-10° et donc l’eau beaucoup plus fraîche et il s’ébroue dans le ruisseau tel un canard dans sa mare. J’ai encore affaire à un nouveau frapadingue cette année. Plusieurs stagiaires ont émis le souhait d’aller au Mont Dore pour acheter du fromage. Yoda appelle son fournisseur officiel et lui indique en catimini : « Prépare toi Maurice, je te ramène dans ta boutique dans 45mn une dizaine de pigeons ».

Départ 18h, nous sommes 8 à nous rendre chez Maurice. Je gare le minibus devant une maison d’un exploitant agricole. Pas de boutique commerciale, nous rentrons, du moins j’en ai le sentiment, dans la pièce de vie de sa demeure. Face à l’entrée, derrière sa table à manger, il a installé sommairement un étal composé de 3 tréteaux, sur lequel il a déposé une planche et sur celle-ci, il propose une vingtaine de tomes de Saint Nectaire. Nous sommes les 8 à la queue leu leu et Yoda est le 1er à passer sa commande. Le filou, il demande une dizaine de Saint Nectaire. Nous y passons tous et Malek ayant remarqué la mascarade commerciale questionne notre hôte afin de savoir s’il a d’autres fromages à proposer. Il nous répond que non, et nous indique le nom et la localisation d’autres exploitations. Une véritable organisation mafieuse. Nous prenons tous a minima une tomme. Cette fin d’après-midi a été plus que réussie pour Maurice. Au moment de partir, Yoda redescend du minibus avec son sac de Saint Nectaire et feint d’avoir oublié sa carte bancaire chez l’exploitant. Au bout de 3mn, il nous rejoint avec un sac qui m’a l’air beaucoup moins rempli. Le filou, je suis persuadé qu’il a rendu quelques tomes à Maurice et pris une petite commission sur les ventes.

Retour à l’auberge, il est presque 19h. Nous laissons les fromages dans le minibus, cela embaume déjà très fortement dans chaque chambrée. Je redescends comme hier soir dans la salle qui nous a été réservé. J’ai  ’impression que sur la table, il y a encore plus de bières qu’hier soir. Un moment de convivialité très apprécié où nous nous racontons des anecdotes sur la journée passée. Les vannes fusent. Des affinités naissent. Je découvre un Malek moins taciturne que l’an dernier. Cela vanne à tout va. Il chambre allègrement Christophe le parisien.

Moment de convivialité après course


L’ambiance est à la déconnade alors que l’autre groupe subit encore une présentation thématique. Ce soir le sujet est les bienfaits de la médecine douce en cas de blessures : acupuncture, physiothérapie... Je reprends une bière, je me félicite intérieurement d’avoir choisi le bon groupe. Yoda nous propose pour demain une journée allégée. Le programme sera une sortie de 4h constituée d’une grande boucle via la vallée de Chaudefour. Olivier le réservé se met à étudier les différents tracés possibles et propose une option à Yoda. Domi le traceur n’est pas dans son élément. Il a moins de certitudes dans cette région que sur le territoire du Puy Mary. L’option d’Olivier est validée. Il sera donc notre traceur demain. Bizarrement, malgré son goût pour les bains glacés dans la rivière, il m’inspire confiance, beaucoup plus que les 2 rigolos de cet après-midi. Nous dînons - au menu une bonne truffade. Nous allons nous coucher, repus. J’espère que le temps demain sera plus clément.

                                                                        JOUR 3

Réveil 7h30. Je regarde dehors, la vue est bouchée. Les sommets ne sont pas visibles. La journée s’annonce encore difficile. 8h, je descends à la salle de restauration, il y a déjà foule pour le café. Il n’y a pas trop de discussions, je pense que la grande majorité se questionne sur ce qui nous attend aujourd’hui. Malek est chafouin. Jo l’éclaireur, présent dans sa chambrée, s’est levé vers 6h00 pour poser des pièges à fouines sans n’avoir une once de compassion pour ses camarades. Il a dû recevoir dans la nuit une commande de fourrures d’un client important. Yoda est également perturbé, il ne retrouve plus son slip fétiche. Il a tout fait avec lui : sa première rencontre féminine – son mariage – ses enfants – la construction de sa maison – ses principales courses – tout…Il cherche, il fouille, il questionne tout le monde - aucune piste. Nous commençons à ranger nos affaires pour le départ de cet après-midi, descendons nos linges de lit afin de les déposer à l’accueil au sein de grandes panières. Malek ne retrouve plus ses gants, il cherche dans les draps, rien – aucune trace. Jo étant dans la chambrée de Malek et également de Yoda, je le soupçonne d’avoir utilisé quelques accessoires olfactifs afin d’appâter les fouines lors de sa chasse de nuit…je vérifierai au retour de notre sortie, s’il n’a pas également utilisé une de mes paires de chaussettes.
Je descends au rendez-vous de 9h, Manu est déjà là, avec la banane. Malek est bougon, il n’a pas retrouvé ses gants. La photo traditionnelle du matin et nous partons sous la pluie derrière Olivier notre traceur du jour.

Dimanche ; Départ 3ème jour

Le temps est maussade, pluie fine et brouillard. Je m’inquiète déjà de ce qui nous attend sur les hauteurs. Nous remontons les pistes en direction de la zone d’arrivée du téléphérique du Sancy. La neige a grandement fondu. En marche rapide, nous doublons des groupes de randonneurs. Au loin, je perçois les premiers de notre groupe à l’arrêt. Sur les hauteurs, ils scrutent un groupe de chamois. Ils ont plus d’aisance que moi à se déplacer dans ce milieu montagnard très rude. Olivier et Manu rameutent l’ensemble de notre groupe. Nous montons groupés sur la plateforme du Sancy. La vue est bouchée, ce qui n’empêche pas Yoda de réclamer une énième photo.

La plupart des personnes du groupe connaît parfaitement la typologie très technique de la descente du Puy de Sancy en direction du Puy Ferrand. Certains proposent donc la sécurité et une descente du côté de l’arrivée du téléphérique. Que nenni, la trace a été validée hier soir et nous la suivons malgré les prévisibles difficultés. La neige, le brouillard rendent effectivement notre progression très périlleuse. La plupart sont prudents. Les glissades sont multiples. Oksana s’accroche – elle vainc ses peurs sans émettre aucun jugement, aucune parole déplacée envers ceux qui l’accompagnent. Intérieurement, je l’imagine nous dire : " Bande de blaireaux, vous savez que je ne suis pas croisée avec un chamois ! ".
Nous arrivons après 15-20 mn de descente à la croisée de chemins :

A droite, direction la station Super-Besse et à gauche descente vers la vallée de Chaudefour via le Puy Ferrand. Le vent est glacial, nous nous protégeons pour attendre tout le monde et nous prenons le sentier direction la vallée. Olivier garde le cap par rapport à sa trace. Il prend la mesure des difficultés et des embûches rencontrées : brouillard, vent, pluie, névés glissants…Il sécurise la trace pour tous, ce qui occasionne de nombreux STOP and GO. Nous arrivons dans le brouillard au Puy Ferrand. Je pense que nous avons minimum 30mn dans la vue sur les horaires prévus. Nous abordons la descente, il n’y a plus de neige mais le terrain est très glissant. Nous nous arrêtons – pour la 1 ère fois du weekend le panorama est somptueux : en contre bas à notre droite, Super-Besse et en second plan le lac Pavin  (Il me semble que Yoda avait prévu de nous y amener dans ses traces initiales), à gauche la chaîne des puys avec au loin le Puy de Dôme et en face la vallée verdoyante de Chaudefour.
 

Malek aperçoit un spot d’escalade qui lui rappelle ses ascensions dans l’Atlas et particulièrement le " Dirs alhiqd fi aljazazahir" . Il capte l’attention de tous tellement son récit est intéressant. Nous repartons en direction de la vallée de Chaudefour.  La descente est longue, très agréable au départ avec des parties où nous pouvons nous lâcher et plus technique sur le final avec des portions très pierreuses. Nous arrivons à destination. Le paysage est complètement différent : très vert avec la présence enfin du soleil. En attendant que le groupe se reforme, Jo l’éclaireur s’éloigne discrètement vers le ruisseau. Il a sûrement dû apercevoir des truites et il est parti poser des nasses. Regroupés, nous nous faisons prendre en photo par des randonneurs.

Nous entamons la longue remontée vers le Roc de Cuzeau. Je pense que l’on doit avoir une bonne heure de retard sur les prévisions. Je ne me fais pas de soucis, Olivier le réservé, nous guide et il donne l’impression de n’avoir aucune hésitation sur le trajet à suivre. Je me cale derrière Anne et Fabienne. La progression est très agréable sur des singles alternant les montées raides et des parties courues, le tout sous les bois à l’abri du soleil. Chacun monte à son rythme. Nous nous arrêtons sur un plateau herbé afin d’attendre toute la troupe. On y perçoit un 1er sommet, avant la partie des crêtes vers le retour à notre auberge. La montée se fait en plein soleil.

Nous y rencontrons un groupe, à l’abri d’un arbre en train de se restaurer. Ils en sont au café, il doit donc être aux environs de 12h30-13h. Mes prévisions étaient donc justes. Nous arrivons à ce 1er sommet et nous en apercevons un second, par lequel la trace doit nous mener. Certains du groupe commencent à donner des signes de fatigue et il est alors proposé un circuit « bis » avec un point de rendez-vous commun un peu plus loin. Je reste caler dans le sillage de Fabienne. Plus que 100m, avant la trace bis…si elle tourne, je tourne. Plus que 50m, pourvu qu’elle tourne, 30 m « pitié Fabienne tourne ! » et son surnom me revient à l’esprit : la guerrière. Je lève la tête, personne n’a bifurqué. C’est foutu, je vais en baver jusqu’au sommet. Montée, droit dans la pente, seul Olivier prend la trace du sentier en lacet et il ne cesse de nous distancer en faisant un tiers de trajet en plus. Le grand Manu me double, il vient de quitter les derniers. En 3 enjambées, il m’a rattrapé. Punaise, il me semble que ses pieds ont encore grandi depuis hier. Il est passé au 78-13. Est- ce déjà des hallucinations ? Je me tais, je serre les dents et je continue. Après avoir gravi ce sommet, nous redescendons vers le point de rendez- vous. Le groupe est de nouveau réuni. Nous courons sur les crêtes et arrivons à un point connu : Le Roc de Cuzeau.

Nous abordons la descente galvanisés par la fin proche. Nous sommes bientôt arrivés.
Dernier STOP commun, on se regroupe, nous percevons les chalets en contrebas. Les plus hardis s’impatientent. Je prends de l’assurance et leur indique d’y aller ardemment sans nous attendre. Ainsi quand nous arriverons, ils seront déjà douchés. Je leur montre le chemin à suivre : « Droit dans la pente, jusqu’en bas ». Olivier le traceur du jour, a juste le temps de balbutier : « A….. » que Malek, Olive, Jeanne et consorts (un pote à Brio) sont déjà loin. J’attends les derniers et explique la situation. Yoda acquiesce :  Ok, chacun descend à son rythme jusqu’à l’auberge. » Je perçois une pointe d’ironie et je m’engage dans la descente avec Fabienne, Anne et Eric. Aucune difficulté, single super agréable. J’enjambe une échelle de clôture et je constate que nous sommes de plus en plus proche du Mont Dore. Je m’arrête et perçois Yoda plus haut, au niveau de l’échelle de clôture, nous  faisant de grands signes. Nous avons tous loupés la bifurcation sur la gauche en faux plat montant. J’enrage, je remets les sangles des bâtons et je remonte jusqu’à la bifurcation. Olive le traceur resté en arrière me montre le chemin à suivre. Les « flèches » du groupe sont beaucoup plus bas. Enfin, je prends le bon chemin et entame une descente technique jusqu’à l’orée des bois d’où nous sommes repartis les 2 derniers jours. Malek et Jeanne me doublent, quelle aisance ! Je double Oksana avec Yoda et Domi, les seuls à ne pas s’être trompés avec Olivier. Eric et Anne sont derrière moi. Enfin je perçois l’auberge, je suis de retour au bercail, il est 14h30. Finalement, la sortie aura duré 5h30, pour 21 km et 1 500 m de D+.
J’ai réussi ce nouveau défi. J’en suis fier. Désormais, je n’espère qu’une seule chose : être de retour chez moi pour 20h.


                                                                                  Epilogue

Ce week-end s’achève donc sur 70 km parcourus pour 4 000 m de D+. Temps exécrable mais ambiance de groupe excellente.

Après de multiples recherches, je n’ai pas retrouvé ma paire de chaussettes du samedi. Je vais contacter Malek le kabyle pour envoyer nos factures respectives à Jo l’éclaireur. Avec ce qu’il a dû se mettre dans les fouilles via son braconnage, je vais lui adresser une note salée.

Tant que nous y sommes dans la filouterie, demain je vais rédiger un courrier anonyme à mes amis douaniers afin qu’il regarde de plus près ce trafic de ventes de fromage. Je n’y mentionnerai pas Yoda. Ne sait-on jamais, si l’année prochaine il me venait l’idée saugrenue de participer à un de ses stages trail.

J’ai repris dans les semaines qui ont suivi, des nouvelles de Chiffounette. Elle aurait frôlé l’amputation ce qui lui aurait permis d’être remboursé de son stage. Aux dernières nouvelles, les médecins lui auraient conseillé d’apprendre à vivre avec un plâtre permanent.

Les incantations de Malek près de la source d’eau chaude ont eu des effets quasi immédiats dans les mois qui ont suivi ce stage. Il attendrait la naissance de ses 21 ème et 22 ème enfant.

Christophe le parisien se serait perdu lors de son retour dans les Yvelines. Son bus aurait été détourné vers le Yémen avec un passage préalable en Syrie. On l’aurait aperçu il y a 10 jours à Damas scandant « Allez l’OM ! ».

Greg et Olive auraient monté un business de création de parcours de trail et trekking. A la Chambre de Commerce où ils ont déposé leur dossier, il leur aurait été conseillé, de suivre une formation de création d’itinéraires. Cette offre étant proposée par l’IGN. Ils auraient refusé. Surtout, l’année prochaine évitez de m’inscrire à un stage proposé par GREOLV.

Olivier le discret, serait devenu ami avec Steve Stievenart dit Steve le phoque. Ils projettent en duo de traverser le détroit de Bering.

Jeanne tombée amoureuse de la montagne est toujours aussi radieuse et s’émerveille de chaque moment de sa nouvelle vie. Elle est désormais traileuse professionnelle dans la Team Salomon. "Courtney Dauwalter" serait impressionnée par ses progrès.

Rénald le chimiste serait en cours de conception d’un élixir de jouvence. Il aurait pris comme cobaye pour ses expériences, Malek le kabyle.

Finalement Domi est allé consulter un médecin quelques jours après son retour. On lui aurait diagnostiqué une triple fracture du coccyx. Il m’a été rapporté, mais je n’ai pas pu corroborer cette information, qu’il aurait répondu au médecin « Que du plaisir ! ».

J’ai rencontré la semaine dernière Manu le bûcheron. Nous avions réservé par hasard, avec nos compagnes respectives, deux nuitées au sein du même hôtel à Saint Jean de Luz. J’étais au 2ème étage et lui au 3ème. La journée était radieuse avec un soleil de plomb. C’est alors que soudain en pleine journée, j’ai eu l’impression qu’il y avait une éclipse de soleil. Surpris de ce phénomène, j’ai levé la tête, et j’ai pu constater qu’il ne s’agissait nullement d’une éclipse. Manu le bûcheron, avait laissé pendre ses pieds sur la rambarde de son balcon.

J’ai ce jour une pensée particulière pour Oksana. Elle était comme moi l’an dernier, néophyte de cette discipline. Elle ne s’est jamais plainte durant ce séjour et n’a jamais fait signe d’un quelconque ras le bol. Je lui conseillerai, si je peux me permettre le lâcher prise et de pratiquer le cri primaire « Bande de tarés, allez tous vous faire soigner les chamois ! ».

Je m’excuse platement de ne pas avoir pris le temps de contacter les autres membres de ce séjour afin d’avoir de leurs nouvelles. J’espère sincèrement pouvoir retrouver Nico, Wills, Anne, Eric, et Fabienne sur des courses ou des stages à venir.

                                                        Remerciements

Merci à Yoda pour l’organisation de son stage Trail malgré une météo déplorable.

Merci à tous les participants pour leur personnalité singulière et l’ambiance potache et bienveillante créée durant ce week-end

Merci à Nico et Olivier le réservé pour avoir secondé Yoda, en dernière minute, dans la proposition des différents parcours.

Et pour finir, un remerciement tout particulier à ma compagne qui m’autorise depuis 2 ans, à vivre de tels moments de partage et de défis sportifs.

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27 décembre 2022 2 27 /12 /décembre /2022 22:52
Le départ de l’épreuveLe départ de l’épreuve

Le départ de l’épreuve

L’Ile de France n’est pas la plus réputée des régions de France en matière de trail. Qu’importe ! Une association du Val d’Oise a décidé de faire sienne la devise « on n’a pas beaucoup de relief mais on a des idées ». Leur terrain de jeu ? La forêt de Montmorency qui culmine à 192 mètres d’altitude, posée sur des meulières et des grès de l’Oligocène. Le concept ? Un dédale de chemins monotraces piégeux dans la forêt domaniale.

Mon frère François, traileur francilien, a participé à la 3e édition de l’épreuve en 2021.

Je décide au printemps de m’engager avec lui sur le 43 km de l’édition 2022. Cela tombe bien, je fête mes 40 ans quelques jours avant l’épreuve. Je vais donc pouvoir tester avec lui ma forme à raison d’une bosse à digérer par année au compteur ! L’épreuve cumule 2000 D+. Au vu du relief local, on se doute que les organisateurs vont aller chercher le dénivelé au maximum pour atteindre ce chiffre. On ne sera pas déçus !

La veille de la course, les températures annoncées sont fraiches (2°C) si bien que l’organisation décide de rendre obligatoire le « kit grand froid ». Les conditions ne seront pas polaires mais, au milieu de la forêt humide, il vaudra mieux être bien équipé et ne pas trop s’arrêter. Pour annoncer aux participants les nouvelles conditions d’équipement, l’organisation poste sur la page Facebook de l’événement un message accompagné du clip « Fous ta cagoule » de Fatal Bazooka. Le ton est donné : apparemment les organisateurs ont autant d’humour que de talent pour choisir les chemins les plus vicieux du coin.

Nous arrivons à Saint-Leu-la-Forêt largement en avance pour retirer nos dossards le matin de la course. Cette année, une nouvelle course a été ajoutée au programme pour les plus déterminés : un 86 km (2 boucles de 43 km) avec un départ à minuit. Personnellement, je ne vois pas trop l’intérêt de cette version mais certains se sont laissés tenter. Le gymnase de départ/arrivée servant de base de vie pour cette course, nous voyons les coureurs ayant terminé leur première boucle. 

Au premier plan les coureurs du 86 km se restaurent. Au second plan, mon frère et moi-même, en vestes rouges rouges, attendons le départ parmi les coureurs du 43 km.

Pendant que certains se restaurent, je remarque une affiche collée au mur leur indiquant « Plus que 45 km ». Beaucoup de participants sont marqués par l’effort, boueux, et certains semblent même complètement hagards, totalement lessivés après plus de 7h à courir de nuit dans la forêt. Nous assistons à plusieurs abandons. Malgré une météo sèche (pas trop de pluie les jours précédents et aucune goutte le jour J), la forêt est très piégeuse, surtout de nuit, et nous sommes informés par l’organisation que de nombreux abandons ont eu lieu, souvent à cause de chutes ou de foulures. A ce moment-là, on se dit que l’on préfère clairement faire la boucle de jour et qu’il va falloir être vigilent. J’apprendrai durant la course que l’expérimenté traileur italien Luca Papi a, lui aussi, été victime d’une chute après seulement 10 km dans la nuit et a été conduit à l’hôpital. Après avoir fait un vol plané suite à une glissade il est s’est ouvert la main droite en retombant au sol.

Les coureurs du 86 km se restaurent après leur première boucle effectuée de nuit à côté du panneau « Plus que 45 km »

Le départ est donné à 8h30 en deux vagues. Nous avons décidé de faire au moins le début de la course ensembles tant que nos allures ne divergent pas trop. Le circuit monte rapidement en direction de la forêt. Du fait du nombre important de participants (560 inscrits), cela bouchonne dans les premiers lacets de la forêt. Au bout de 100m dans les bois, une première difficulté donne le la : un talus abrupt à descendre et son homologue à monter dans la foulée. Il faudra encaisser de nombreuses difficultés de ce type durant la course. Le parcours redescend ensuite vers la ville, dont les habitations sont pour beaucoup de belles maisons bourgeoises en meulière, pour mieux repartir dans les bois. Il faudra s’y habituer : le circuit est construit pour faire découvrir aux concurrents toutes les meilleures montées du coin. Chacune des montées fait entre 20 et 50 m D+ mais il faudra en enchaîner beaucoup pour rallier l’arrivée.

Les sensations ne sont pas très bonnes dans les premiers kilomètres. J’essaie de garder un rythme correct sans me griller pour la suite de la course. Je marche pas mal de montées dans cette optique. De toute façon, les premiers kilomètres sont encore un peu embouteillés et il n’est pas possible de faire bien différemment. Il faut aussi veiller à ne pas tomber. A part deux petites frayeurs dans la première grande descente, cela se déroule bien. J’arrive avec mon frère au premier ravitaillement qui semble surgir au milieu des bois autour du km 13. Vu la distance parcourue depuis le départ, ce ravitaillement n’a pas grand intérêt pour les coureurs du 43 km. J’ai pris suffisamment de réserves pour tenir jusqu’au principal ravitaillement du km 20. Les chemins sont désormais plus dégagés et je réalise que les sensations sont également meilleures. Je dépasse sans trop de difficultés plusieurs concurrents en courant mais aussi dans les montées marchées sans avoir le sentiment de peiner. Mon frère commence à décrocher un peu dans les côtes. Il a eu des pépins physiques dans les semaines avant la course et est arrivé sans préparation. Je me doute que je vais devoir partir devant dans la deuxième moitié de course.

Deux concurrents grimpent le raidard au Pont du Diable

Cette année, les organisateurs ont dispensé les concurrents de passer les pieds dans l’eau et l’échine courbée par un petit tunnel de leur cru, sorte d’hommage local à la Barkley. En revanche, vers le kilomètre 18, le parcours passe au « Pont du Diable », un raidard emblématique de la course par lequel il faudra repasser au km 40 avant un retour bien mérité à Saint-Leu. J’arrive au ravito du km 20 installé dans une école à Taverny. Je mange un peu, recharge mes flasques et repart rapidement accompagné de mon frère qui a réussi à me rejoindre. Sans surprise, il faut rapidement monter à nouveau vers la forêt pour aller chercher de nouvelles bosses. A la mi-course, dans une montée raide où j’ai déjà pris pas mal d’avance sur mon frère, je décide d’augmenter l’allure car je me sens encore bien et j’ai envie de voir ce que j’ai dans les jambes. A partir de maintenant, les montées peu pentues seront toutes courues, les montées marchées seront plus appuyées et les relances sur les parties planes seront plus franches. Rapidement, je m’aperçois que je rattrape beaucoup de coureurs. Ceux-ci peinent dans les montées raides et ne prennent depuis longtemps plus les faux plats en courant. A partir du km 27, le parcours passe par une interminable montée en zig zag autour d’une ligne haute tension qui traverse la forêt (une autre portion inspirée de la Barkley ?).

Des concurrents redescendent par un chemin sympathique après la première montée du secteur du Pont du Diable.

J’arrive au ravitaillement du km 31 après avoir gagné une centaine de places. J’ai prévu de faire un arrêt éclair à ce ravito qui ne propose que du liquide car j’ai assez d’eau pour finir la course. Je prends tout de même le temps de m’alimenter avec mes réserves personnelles mais repars vite avant de me refroidir. Je continue sur le même rythme et gagne encore des places. A partir du km 35, je sens la fatigue monter graduellement. Cela fait déjà bientôt 30 kilomètres que je tourne dans cette forêt sans avoir la moindre idée de l’endroit où je me trouve. Cependant je m’efforce de ne pas y penser et reste concentré sur le tracé (petit clin d’œil aux joueurs de football qui « prennent les matchs les uns après les autres »). Je ne suis déjà plus trop loin du but. Petit à petit, les coureurs deviennent plus difficiles à dépasser. Ils ne sont plus désunis comme leurs prédécesseurs et ont toujours les ressources pour prendre quelques montées en courant. J’encourage des coureurs du 86 km qui, souvent munis de bâtons, peinent depuis 12 heures sur ce tracé. Je me fais la remarque que ce sont bien eux qui ont signé pour souffrir sur cette épreuve exigeante.

Ma montre approche des 40 kilomètres au compteur. Je commence à me demander quand on va redescendre vers Saint-Leu-la-Forêt car en théorie la course fait 43 km. Je demande à des bénévoles qui m’annoncent 5 km avant l’arrivée. Vers le km 43, il faut à nouveau passer par le Pont du Diable. Le deuxième passage fait nettement plus mal aux jambes mais ça va encore, l’écurie est proche. On nous annonce 1,5 km avant l’arrivée puis, 1 km plus tard, il reste encore 1 km à parcourir ! En gros, personne ne sait exactement combien il reste avant l’arrivée. Comme d’habitude… Au km 45, je sors de la forêt et retrouve la civilisation… jusqu’au moment où je m’aperçois que l’organisateur, décidément taquin, a encore placé une petite boucle de 500 mètres en forêt. A ce stade-là, c’est autant pour mettre à l’épreuve le mental du coureur que pour faire du D+ ! Après cette facétie, je peux enfin descendre à grandes enjambées vers l’arrivée. Les premiers concurrents du 10 km me dépassent à toute allure dans les derniers hectomètres. Dans le dernier virage, un coureur du 43 km que j’avais dépassé un peu plus tôt me dépasse en piquant un sprint. Il sera le seul coureur de mon épreuve à m’avoir dépassé depuis le kilomètre 20. Après avoir fait une remontée d’environ 180 places, je termine 133e sur 450 partants en 6h15 avec un peu plus de 46 km et 2100 D+ à ma montre. Mon frère arrivera 1h après moi faute d’avoir pu maintenir son allure de la première moitié de course. Je l’attends pour déguster avec lui le hotdog proposé aux arrivants qui est apparemment une spécialité de cette course (je confirme qu’il est bon). On ne s’attarde pas sur la ligne d’arrivée car il fait froid et je dois rentrer à Poitiers dans la soirée.

La trace un peu folle de cette épreuve. J’ai compté : les 40 bosses y sont sur le profil topographique !

Cette course a été une expérience positive pour moi car j’ai pu participer pour la première fois à un trail avec mon frère. Sur le plan de la performance, j’ai été satisfait de ma course que j’ai su mener crescendo en contrôlant mon effort et sans trop subir le parcours. Je pense avoir passé avec succès la « révision des 40000 km ». Même si ma préparation en novembre a été un peu tronquée, le travail fait depuis septembre a payé : mon endurance et ma vitesse en course ont nettement progressé. Ce trail s’est révélé bien organisé avec un notamment un très bon balisage (pas évident de gérer 46 km de balisage en forêt avec de très nombreuses intersections !) et de super bénévoles. Mention spéciale pour le hot-dog à l’arrivée qui fait vraiment du bien (la bière qui va avec aussi d’ailleurs).

Pour résumer, les 40 bosses c’est plutôt pour vous si :

-vous aimez courir en forêt

-vous n’êtes pas allergiques à la boue et au froid

-vous appréciez ou tolérez les montées en répétition

-vous êtes prêts à courir sur une trace tortueuse concoctée par des organisateurs un poil vicieux et fans de Lazarus Lake.

Ce trail n’est pas pour vous si :

-vous pensez à tort que les Franciliens sont des cons

-vous pensez qu’aucun trail digne de ce nom n’est organisable en Ile-de-France

-vous détestez tourner en rond dans une forêt sans savoir où vous êtes

-vous n’aimez pas les hot-dogs

Olivier Chavasseau

 

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27 juillet 2022 3 27 /07 /juillet /2022 21:27
 UT4M - BELLEDONNE   ; PETIT CR D'UN RETOUR AU TRAIL PAR  THIMOTHEE ROY !
     UT4M - BELLEDONNE    :  48KM ET   2930m D+  : Quel  ratio Kilomètres/dénivelé   !              
Après deux nuits passées dans Grenoble à 26°C et un vendredi à 41°C, je mets mon premier dossard depuis longtemps, sans repère sur ce que je peux faire et ne connaissant que très peu le Massif de Belledonne.
Départ 8h20, au frais après une petite pluie...mais comme la veille sur les autres courses comme le 40km du Taillefer réduit à 25 pour canicule, l'hydratation va devoir être très suivie .
Petit tour du village de Riouperoux d'un km pour se chauffer et hop...on attaque le km
vertical et demi...3h de montée presque non stop... excepté le ravito liquide sur le plateau de L'arcelle...
Arrivée à Chamrousse, le soutien des proches montés pour moi me remotive ! Je sens tout de même que ça va être long...
J'avance normalement jusqu'au refuge de Pra (ravito liquide) et là.....genou qui coince, mollets en feu, ischios qui chauffent mais il reste encore 600m de D+ dans le pierrier du col de Freydane (2600m) .
La suite? 2200m de D- presque non stop à surveiller la barrière horaire pour arriver à temps, gérer les douleurs et prendre des lacs en photos (☺️ bah oui tout de même, on est pas venus pour rien) La dernière heure a été un combat de chaque instant pour finir dans les temps, les derniers encouragements et les derniers mètres avec les proches permettant d'y arriver ! 309ème en 12h28 !
 
 

 

 
 
 
 
 UT4M - BELLEDONNE   ; PETIT CR D'UN RETOUR AU TRAIL PAR  THIMOTHEE ROY ! UT4M - BELLEDONNE   ; PETIT CR D'UN RETOUR AU TRAIL PAR  THIMOTHEE ROY !
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15 juin 2022 3 15 /06 /juin /2022 22:08

391 coureurs partant (108 abandons) – classé 281 unième

Départ de Saugues à 21h le vendredi 10 juin (pour les coureurs ayant un index UTMB inférieur à 600). Phiphi au moment de partir me dit : « Sur le site du Trail de Saint Jacques, ils indiquent que pour être finisher il faut être au-delà de l’index UTMB 410 ». Il regarde sur le site UTMB et lis Philippe MORIN 412, Franck BROCHAIN 413. Cela va être compliqué ! Le début de course se passe bien.

 

J’allume ma frontale vers 22h15 et j’arrive facilement à Prades (1er ravito).

Vers le 30ème km, aux alentours de 2h le samedi, je commence à avoir un petit coup de mou. Lever 6h la veille, 5h de route en tant que chauffeur et pas de sieste réparatrice commence à attaquer le bonhomme. De plus les élites partis à 23h nous dépassent comme des fusées et tu en prends un 2ème coup sur le casque. Je parviens au 2ème ravito au 38ème km– toujours à Prades. Tiens je reconnais cet endroit. En effet, nous avons fait une boucle de 23km. Phiphi m’y rejoins et nous serons alors ensemble jusqu’à la fin de la course. Nous repartons vers le prochain ravito qui est au 51ème km. Des montées très ardues et des descentes très techniques sur lesquelles je ne suis pas du tout à l’aise. Il est 5h30, le jour commence à poindre et j’éteins ma frontale. Elle aura tenu 7h sans recharge – c’est pas mal ! Nous arrivons sur le pont Eiffel à Monestrol au km 51. 1ère barrière horaire passée aisément avec 2h30 d’avance. Je suis toujours avec Phiphi. Je repars en éclaireur et entreprend seul une  montée longue et très raide avec un sol de terre ocre poussiéreuse. Au ¾ de la pente, superbe vue. Il fait déjà très chaud, je m’attarde à un abreuvoir et m’asperge d’eau froide. Phiphi me rejoint et nous finissons la montée ensemble. La chaleur n’est pas mon amie et nous ne sommes qu’au 55ème km.

 

Nous passons le ravito suivant à St Privat d’Allier (58ème km). Les élites du 72km nous dépassent comme des bombes. Mais comment font-ils pour courir si vite dans des descentes très techniques et piégeuses ? Nous enchainons à répétition plusieurs montées très difficiles suivies de descentes compliquées. Il fait très chaud. Sur la dernière montée avant le prochain ravito, dans une pente approximative de 45%, les premiers participants du 43 km nous doublent en courant. Des chamois, les gars. Ils doivent avoir des dispositions anatomiques exceptionnelles. Nous arrivons à St Jean Lachalm au 67ème km, lessivés. Il s’agit de la seconde barrière horaire. Nous sommes justes mais néanmoins on s’alimente, on fait le plein d’eau, on se repose 10mn et on repart. Au passage de la barrière horaire, nous sommes en retard de 2mn30s. Les commissaires nous bloquent le parcours du 123 km et nous déroutent vers le parcours du 43 km qui vient juste de partir. Nous sommes déçus de ce détournement mais intérieurement, au vu de la chaleur, satisfaits de pouvoir finir néanmoins cet ultra sur un parcours de délestage. Phiphi me relance, je suis au plus

bas et faire encore 34km sous cette chaleur me semble impossible. Nous ne sommes plus abrités, en plein soleil vers 11h30 et il fait déjà plus de 30°. Les coureurs du 43 km nous doublent et nous encouragent. Nous passons le sommet Mont Devès à 1 400m d’altitude. Les 200m de fin d’ascension sont très très compliqués. Ceux qui n’ont pas de bâtons perdent leurs appuis dans la pente poussiéreuse et reculent. Les concurrents cherchent des points d’ombre pour faire des haltes dans l’ascension. C’est le carnage ! En fin de montée, les gens s’arrêtent pour la vue et encouragent les autres participants dans les derniers mètres. Je me poste au sommet et prend une photo de mon Phiphi en plein effort.   

 

Tout le monde est désormais sur le même parcours final 123 ,72 et 43 km. Nous descendons alors vers le prochain ravito qui se situe à Saint Christophe. Nous sommes alors à nos montres au 84ème km. Plus de barrière horaire pour nous. Nous nous encourageons mutuellement. La chaleur atteint nos organismes. Sentiment de lassitude et là c’est le mental qui joue son rôle primordial. Ne rien lâcher, finir coute que coute. Cela fait déjà un moment que l’on ne court plus afin de conserver un maximum d’énergie pour finir. A 10 km de l’arrivée en montant sur une partie route, je ressens une grosse brulure à l’avant du pied droit. Une ampoule vient d’éclater. Je mets le clignotant à droite, me fais un pansement réparateur et reprend difficilement la marche. Phiphi, mon cher binôme m’a attendu et nous poursuivons notre chemin de croix.  En descendant vers le ravito suivant, de loin sur le parcours on voit une voiture de pompier en plein champ. On y arrive et les secours sont en intervention auprès d’un concurrent ayant fait une insolation. Notre angoisse jusqu’à la fin sera de subir les mêmes effets que ce traileur. Passage de la dernière ascension à la Garde d’Eycenac. Grimpette courte mais très pentue. Avec Phiphi, on est en surchauffe et on fait une halte de 2-3mn à l’ombre à moitié d’ascension. On arrive juste avant le dernier ravito dans un village où un de ses résidents a laissé à disposition des traileurs un tuyau d’arrosage ouvert. Avec mon acolyte on remplit nos réserves d’eau, et on asperge nos casquettes et manchons (remis pour éviter les coups de soleil sur les bras). Durant 1km la sensation de fraicheur est bien présente mais le soleil reprend le dessus juste avant d’arriver au dernier ravito à Les Chibottes. Nous avons parcouru à nos montres 96 km et les bénévoles nous informent qu’il ne nous reste que 5 km à parcourir. C’est gagné nous y sommes, mais à nos dépens nous allons déchanter quant au final.

Nous partons et nous débutons par la montée d’une quinzaine de marches de 70 cm chacune (style Réunion la Diagonale), enchainement avec un passage de pierriers d’une centaine de mètres (gros blocs de pierres style L’Echappée Belle), puis descente très technique et pentue. Seulement 1 km de parcouru. Ok, les traceurs sont très vicieux ! Nous avons désormais en vue le Puy en Velay. Nous contournons toute la ville afin d’entamer la descente. Plus que 2 km. Nous y arrivons, un panneau nous avertit « attention- descente très dangereuse ». T’inquiète, nous allons faire attention. Au vu des efforts fournis depuis plus de 22h, on ne va pas se « crasher »

lamentablement à 2km de l’arrivée. Avec Phiphi, on prend notre temps en sécurisant tous nos appuis. Nous entrons alors dans le Puy et pénétrons dans la vieille ville pavée. Les barrières UTMB sont en vue, l’arrivée est proche.

Dernier effort à fournir, l’ultime montée vers le pied de la cathédrale. Ereintés, nous ne faisons même pas l’effort de courir. Un check avec Phiphi, un sourire complice et nous passons la ligne d’arrivée ensemble.

101 km en 22h27 avec 3 896 m de D+ 4 161 D- et des températures avoisinant en fin de parcours 35 degrés.

Un grand merci à Phiphi, qui m’a permis par sa présence de terminer mon plus gros challenge trail de l’année 2022. J’ai eu la confirmation ce weekend, qu’en trail la chaleur n’est pas mon amie.

Franck

 

FRANCK BROCHAIN : Compte rendu Trail Saint Jacques (Puy en Velay)10-11 juin 2022 123 km ; 5 150 m D+
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3 novembre 2019 7 03 /11 /novembre /2019 23:28

Depuis le dimanche 13 octobre, je suis sur l’ile de la Réunion. Après, 3 jours de travail, le jour J du départ est arrivé. Vers 15h, je m’habille pour la course et finalise mes derniers sacs à déposer aux 3 bases de vie – Cilaos – Ilet Savannah et La Redoute. Je descends vers le lieu de départ de la navette St Denis - St Pierre, sur le bord de l’océan - arrêt Barachois. Nous sommes une centaine de trailers à attendre les bus. A 16h15 - l’heure annoncée, les bus arrivent mais ils ne s’arrêtent pas et nous font signe d’aller plus loin. Nous prenons tous nos sacs et marchons jusqu’au début de la route du littoral soit 500m plus loin – 1er couac.

Nous nous installons pour 2h00 de voyage au gré des différents coureurs à récupérer sur le trajet. Arrivé à St Pierre vers 18h30, je prends la direction du dépôt des sacs des bases de vie. Cela bouchonne, c’est un peu l’anarchie et l’organisation est un peu dépassée – 2ème couac. J’attends facilement 45mn et j’en profite pour me restaurer. Je dépose mes 3 sacs, et je récupère auprès des bénévoles un bracelet de course jaune oublié la veille lors de la remise des dossards. Je passe ensuite assez rapidement le contrôle des sacs de course et accède alors à ce grand parking de graviers d’avant départ – il est  19h30, je suis impatient d’être sur la ligne de départ. Je vais prendre un café, une compote et une banane à un stand et je tombe nez à nez avec une connaissance avec qui je jouais au foot au stade poitevin il y a 30 ans. C’est dans ce genre de situation que l’expression  « le monde est petit » prend tout son sens. Je m’approche ensuite le plus près possible des barrières à 50m de la scène d’animation. Je m’installe à peu près 1h45 avant la course. Et c’est là que me revient ce que m’avait conseillé Sandrine : « Prends un carton – tu pourras ainsi t’y allonger avant le début de la course »  – 3ème couac j’ai oublié le carton.

Je me pose, mets mon coupe-vent et fais une petite sieste de 30 mn. Nous sommes à 1h du départ, l’animateur commence à chauffer les spectateurs et les trailers.

A l’arrivée des élites, d’un seul homme tout le monde se lève et se presse vers les barrières. Des sacs, des lunettes, des dossards, des clés de voiture sont égarés et de multiples annonces de recherche sont passées par le speaker. 15mn avant le départ, les bénévoles forment une chaine humaine main dans la main et accompagnent les élites vers l’arche de départ. Les grilles s’ouvrent et les anonymes suivent les élites. Il est 21h55 et je me prends en photo avant le départ.

FRANCK BROCHAIN- DOSSARD  2319 - MA DIAGONALE DES FOUS -

 22h02 le départ de la course est donné.

D’abord au pas pendant 100m, je commence à courir. La foule est amassée tout au long du début du parcours. Les encouragements fusent, les enfants tendent leur main. Cette avenue de départ est noire de monde. Une sensation à la fois d’oppression et de liesse. C’est énorme. Et cela dure, c’est magique, je n’ai jamais vécu un truc pareil et je profite, je profite comme un môme. Un feu d’artifice est tiré et des groupes jouent de la musique sur notre passage. Je suis grisé, je souhaiterai partager ces instants, communier mon bonheur de vivre ces moments, mais je suis seul. Nous sortons de Saint Pierre au bout de 30 mn et commençons à traverser les champs de cannes à sucre. Les frontales sont allumées et une ligne de lumière s’étire dans la nuit. Nous montons toujours et le sentier se rétrécit. Nous sommes les uns derrière les autres et cela bouchonne au franchissement des multiples échelles qui se succèdent. Après 15km, je passe le 1er ravito assez rapidement. J’enchaine vers le second au 25ème km où la température a baissé de manière significative. Il fait froid, je mets mon coupe-vent et mes gants. Heureusement que l’on m’avait prévenu, je n’aurai sinon jamais pensé à les mettre dans mon sac ainsi que mon bonnet. Les nuits seront très fraiches au niveau des sommets. J’arrive au petit matin au parking Aire Nez de Bœuf 2040m – 38 km de fait. Il fait très très froid, le sol est blanc, il a gelé dans la nuit – le thermomètre est descendu à – 4°. Je prends une soupe chaude, un café et quelques fruits secs. Je descends vers Mare à Boue par des singles à travers des prairies puis arrive à un panneau indiquant Piton des Neiges.

Dans ma mémoire, je ne pensais pas  y passer mais bon c’est le chemin fléché donc j’y vais. Du parcours je n’ai retenu que les bases de vie et leur kilométrage. Heureusement il est matérialisé sur mon dossard. Je suis sur une partie bitumée, je cours pendant 2 km pour rejoindre le ravito Mare à Boue.
Il est un peu moins de 8h, il fait déjà chaud et j’ai faim. Je m’attarde un peu pour prendre des pâtes et du poulet massalé, je fais le plein d’eau et de coca quelques fruits et c’est reparti. L’arrêt a duré moins de 20mn. Je pars pour 8-9 km de montée dans des chemins humides et boueux à travers des rondins de bois plus ou moins gros et glissants.

Je prends l’allure d’une  locale accompagnée d’un ami breton et pendant toute la montée, elle parle de son île – de sa faune, sa flore, ses coutumes et de sa gastronomie. Je bois ses paroles. Je suis captivé par ses récits

 

 

J’en oublie que je suis dans une partie montante dans la boue et qu’à tout moment je peux glisser. Je grimpe vers coteau Kerveguen 2200m. Je descends ensuite vers Mare à Joseph ;  partie technique et périlleuse pour enfin arriver à Cilaos ; 1ère base de vie.

Il est à peu près 13h soit 65 km en 15h. Je récupère mon sac et me dirige vers les vestiaires du stade. Je ne fais pas l’erreur du GRP. Je me douche (à l’eau froide) et me change entièrement. Je me passe de la crème sur les pieds – pas une ampoule – je laisse une recharge de frontale et prends une deuxième lampe, je refais le plein de barres de céréales, recharge mes flasques et m’alimente un peu. Je repars. J’ai dû m’arrêter 30 à 40 mn et possède plus de 4h d’avance sur la barrière horaire. Tous les voyants sont au vert. La reprise est difficile avec la chaleur, heureusement le parcours est descendant. Je récupère le sentier Taibit après une raide montée. J’ai alors une superbe vue sur le cirque de Cilaos.

Je prends une photo et je repars.

 

L’ascension du Col du Taibit 2080m est compliquée avec des pourcentages importants. A mi-chemin, je m’accorde une petite pause, le temps de prendre une tisane « ascenseur », comme me l’avait conseillé Axelle. .J’arrive en haut au-dessus des nuages et m’arrête quelques instants pour contempler le spectacle d’un superbe coucher de soleil. C’est si beau, que je suis ému d’une telle vue et à la limite de pleurer. La fatigue commence à se faire sentir.

 

Je reprends la course et descends jusqu’à Marla. Il fait nuit, il est 19h. Je prends de la soupe, du salé et du café, je mets mon coupe-vent et mes gants et je repars. Je poursuis par l’ascension vers la Plaine des Tamarins puis le col des bœufs  et m’engage ensuite vers la plaine des Merles à 1805m où je me restaure d’aliments chauds.

 Le départ a été donné il y a 24h, j’ai parcouru 85km, il fait froid. J’appelle alors ma compagne pour l’informer de ma situation en course (ce sera le seul appel). Elle me dit que beaucoup de monde me suit sur le lien du Grand Raid. Cela fait du bien de l’entendre et de se sentir soutenu. Je raccroche et m’accorde une sieste de 20 mn emmitouflé dans ma couverture de survie. Je me réveille et me rappelle les conseils de Jacky « Ne t’arrête pas avant le 100ème km ». Pourquoi n’y ai-je pas pensé avant ? Je repars et regarde mon avance sur la barrière horaire +4h  - c’est encore bon !

 Je descends vers sentier Scout. J’ai l’impression d’être revenu à Mare à Boue – mêmes conditions boueuses sauf que cela descend. Depuis 500m, je ne vois plus de rubalises, personne devant moi, personne derrière. Je m’inquiète, je ralentis puis m’arrêtes. Ouf, je vois une lampe allumée dans ma direction - un local – il s’arrête et me demande : « ça va ? ». Je lui réponds  « tout va bien, mais je ne vois plus de balisages depuis 500m ». Il me dit en créole : « t’inquiètes, il n’y a qu’un seul chemin et c’est le bon. ». Enfin, c’est ce que j’ai cru comprendre. Il ne s’arrête pas et relance. Je repars dans son sillage, j’essaie de le suivre mais son rythme est trop rapide. Je 

le laisse partir et me concentre sur le chemin très glissant. . Une fois passé le lieu dit ‘’ La Plaque’’ j’arrive sur un pont de bois. Il y a 4-5 personnes devant moi qui attendent. Je ne comprends pas cet arrêt. Le passage du pont n’est en fait autorisé que pour une personne sur une distance de 20m. Je m’y engage, le pont balance. Heureusement il fait nuit, je ne vois pas si le vide dessous est important . Après une rude montée, j’arrive à Ilet à Bourse où je prends quelques fruits et fais le plein de mes flasques.

Arrêt 5mn, je repars. Je continue de descendre puis attaque un raidillon escarpé. J’arrive en haut fatigué et dans la descente vers le prochain ravito Grand Place les Bas, je recherche un endroit pour me reposer. Je m’écarte du chemin pour ne pas être gêné par les lumières des frontales et je m’installe sur un parterre de mousse (Merci Sandrine). J’ai suivi également les conseils de Jacky, je regarde ma montre j’ai parcouru 96km.Il ne fait pas froid, pas besoin de sortir la couverture de survie. Je m’allonge et m’endors rapidement. Je me réveille – mon sommeil n’a duré que 30mn  mais je me sens déjà beaucoup mieux. Je repars, fringant, jusqu’à Grand Place où je m’attarde très peu de temps. A peine 5mn pour prendre des fruits et du coca. Je descends ensuite à la queue leu leu une partie périlleuse où tout dépassement est risqué voire impossible. Je me cale dans la foulée de la personne devant moi et je le suis jusqu’en bas. A l’issue mes cuisses sont en feu et je m’accorde une petite halte avant d’entamer la montée vers le prochain ravito. Les montées sont de plus en plus sèches et très pentues, pas de lacets, direct dans le dur. J’arrive en haut de cette partie et entame une descente périlleuse vers le prochain ravito. Il fait encore nuit, je me restaure en aliments chauds et prends un café. Je fais également le plein de mes flasques. Je m’assieds et entends un groupe discutant sur la suite du parcours – 5h encore pour atteindre le sommet du Maido. Je regarde ma montre et repars afin d’être là-haut vers 10h30. Je monte vers Roche Plate et j’ai bien fait dans ma préparation de suivre à la lettre les conseils de mon coach Kiki – « entraine-toi à monter des marches plus ou moins hautes. Tu vas en bouffer jusqu’à en avoir une aversion ». Pendant 1h30 je ne fais que gravir des marches de rondins et c’est interminable.. J’arrive au sommet de Roche Plate - un cimetière à ma gauche et une vue splendide.

Le soleil vient de se lever et je ne m’attarde pas car je crains la chaleur dans la montée du Maido. Je descends 2-3 km et arrive au ravito de l’école de Roche Plate. Je me restaure et fais le plein de mes flasques. J’ôte mes chaussures et me fais un soin des pieds. Impressionné,  toujours aucune ampoule (un p’tit clin d’œil à Greg).

 

  Je repars après 15mn d’arrêt vers la montée du Maido qui se dresse devant moi. Ce n’est pas possible, nous n’allons pas monter tout en haut de cette masse rocheuse ! Un concurrent me dit : « Ne regarde pas en haut cela va te plomber le moral ». Pendant plus de 2h je vais me rappeler cette phrase. Je pars prudemment vers La Brèche - début de l’ascension. Il est 7h30 et la chaleur commence à monter. Je continue, toujours plus haut, toujours plus chaud.

 J’entends des encouragements au loin mais ne perçois rien. Je n’ose regarder vers le haut pour ne pas me décourager. Pas à pas, je me rapproche du sommet, mais que c’est long. Je fais une première halte et en profite pour mettre ma casquette saharienne. Je repars et continue à gravir ces rochers imposants. Je double de nombreux concurrents arrêtés sur les côtés du chemin. Merci Kiki pour tes conseils précieux.

A moitié d’ascension j’entends de mieux en mieux ces encouragements. Je ne lève pas la tête et continue de grimper. C’est alors que devant moi un local me dit : « un tang ? ». Pourquoi me propose-t-il un jus d’orange d’il y a 30 ans ! Eh non, il s’agit d’un tangue, un petit rongeur ressemblant à un hérisson à poil blanc. Il vient de traverser le chemin et s’est posté juste à côté. Non craintif, il se tient visible de tous. Je reste concentré sur mon ascension et ne prends pas le temps de sortir mon téléphone pour prendre une photo de cet animal rare. Il fait chaud, j’ai hâte d’arriver en haut. Je continue, les clameurs se font de plus en plus audibles. Je relève la tête et aperçois des points de couleur tout en haut de cette masse rocheuse qui se dresse devant moi. Cela me paraît encore très loin. J’ai l’impression de ne pas avancer. Allez continues, mais ne relève plus la tête. C’est là que les bâtons m’auraient été utiles.

 Je continue à gravir ces marches naturelles qui me semblent de plus en plus hautes. Je progresse moins rapidement que je le souhaiterai mais j’avance. Je m’autorise un second stop dans une des dernières portions ombragées avant l’ascension finale. Je prends une barre énergétique et quelques fruits secs, je mets mes lunettes de soleil et je repars. Je croise de plus en plus de supporters ou de randonneurs qui descendent. C’est bon signe, le sommet est proche. Il fait chaud et je souhaite en terminer rapidement avec cette ascension. J’arrive sur un replat cela fait du bien d’avancer un peu plus vite. Les clameurs sont là toutes proches. Je relève la tête et je les vois, ils sont nombreux et ils encouragent les coureurs quels qu’ils soient.

Encore 500m à gravir - 400m continue ! – 300m tu y es presque – 200m je vois le sommet – 100m que c’est bon ces encouragements – 0 J’y suis – Yes ! Là-haut, je m’autorise un arrêt pour prendre une photo du cirque de Mafate. C’est somptueux !

FRANCK BROCHAIN- DOSSARD  2319 - MA DIAGONALE DES FOUS -

Je m’attends à voir le ravitaillement au sommet mais non encore 1 à 2km et j’y suis - Maido Tête Dure. Il est 10h passé, je suis en avance sur mes prévisions. J’ai désormais 5h30 d’avance sur la barrière horaire. Je suis bien – pas de crampes, ni d’ampoules, ni de douleurs traumatisantes. Je me restaure en salé – saucisson, tuc, jambon – du coca coupé avec de l’eau. Je fais le plein de mes flasques. Il fait très chaud. Je regarde le profil du parcours – 15km de descente jusqu’à la seconde base de vie. Je reprends la marche en finissant de manger quelques fruits et un verre de coca. Le début de la descente vers ilet Savannah est une succession de montagnes russes pendant 2-3km. Un vrai casse-pattes.

FRANCK BROCHAIN- DOSSARD  2319 - MA DIAGONALE DES FOUS - FRANCK BROCHAIN- DOSSARD  2319 - MA DIAGONALE DES FOUS -

J’attends avec impatience la vraie descente. Elle arrive, le chemin est propre, sableux avec des marches formées par des rondins de bois. Je reprends la course doucement. Cela fait plusieurs heures que je n’ai pas emmené une telle allure. Je suis confiant sur ma résistance physique. Si la descente est ainsi jusqu’en bas j’y suis dans 2h.

Je continue, l’allure est bonne. Je n’en fais pas plus, je reste sur un rythme de 8-9 km/h. Je traverse une partie ombragée rocheuse, je perds l’équilibre. Mon corps part en avant et par reflexe je me bloque en arrière afin d’éviter la chute. Je sens mon genou gauche se tendre et être à la limite de la rupture. Je réussis à éviter la chute et continue sur mon élan 4 ou 5 enjambées. J’ai alors une vive douleur au genou. Je marche un peu afin de voir si  la douleur est moindre. La douleur est bien présente. Cela ne va pas, cela ne doit pas s’arrêter maintenant, c’est impossible après tous ces efforts consentis. Je me pose à l’écart du chemin et sors une bande d’élastoplaste.

Je me surprends, j’ai prévu dans mon sac une paire de ciseaux. Tous ces signes positifs me font du bien et me rassurent. Pas d’ampoules, pas de crampes, en avance sur mes prévisions…Ce n’est qu’une péripétie que je vais et dois gérer au mieux. Je coupe des bandes de 15-20 cm et je me strappe le genou. Je vais descendre ainsi jusqu’à la seconde base de vie. Je reprends la marche, la douleur est moins vive. Il me reste encore 10km à descendre. Et pendant ce trajet, je vais cogiter. Pourvu que cela tienne jusqu’en bas et là je me ferai soigner par des professionnels. L’arrêt définitif est à cet instant non envisageable et non envisagé. Je marche – j’évite toute reprise de course. Que c’est long 10km de descente en claudiquant. Je perçois les premières habitations ainsi que l’océan. Cette vue est accueillie avec empressement. Je m’interroge sur la suite mais mon but 1er est d’atteindre ilet Savannah. J’y suis presque et la douleur se fait de plus en plus vive. A chaque pas, elle est désormais plus que présente. Mon strapping de fortune ne fait plus l’effet escompté. Cela pue ! Mais je continue sans faire paraître mon chemin de croix aux nombreux supporters présents, qui attendent leurs amis, compagnes et compagnons respectifs.

 Je suis désormais à Ilet Savannah, il est 14h30 et je vais récupérer mon 2ème sac. Je prends une douche (toujours froide), arrache mon strapping  et je me change. J’arbore maintenant le second maillot sans manche de la Diagonale. Je compte à cet instant le porter jusqu’à la Redoute. Je vais à la tente des kinés et podologues pour me faire soigner. Je souffre mais je serre les dents. Deux jeunes praticiens m’auscultent et diagnostiquent une luxation du genou. Et alors, que faire maintenant ! Ils me posent un strapping mais me préviennent que c’est uniquement pour le maintenir dans l’axe. Sur la table, mes pensées se bousculent. Je repars ou pas ? Je souhaite prendre cette décision seul, pas d’appel à ma compagne ou à Kiki. Cette décision m’appartient, je la souhaite la plus réfléchie possible sans pression d’aucune sorte.

Je remets mes chaussures et essaient de trottiner jusqu’aux tentes de ravitaillement. Impossible, cela me lance au sein de la partie externe de mon genou gauche. Je réfléchis, il me reste 35 à 40 km avec quelques parties encore bien compliquées. Tout allait bien, il y a 3h ce n’est pas possible de m’arrêter là. Allez un essai en marche rapide – même douleur. Je me rappelle les paroles de JPP lors de la MaxiRace à Annecy : « Ne rend jamais ton dossard, tu le regretteras plus tard ». Je m’interroge, je regarde le profil du parcours. Prochain ravito dans 8km et 4h30 prévu pour y parvenir. Dans mon état, je me dis, je pars pour 5h de souffrance. Je veux continuer mais est-ce raisonnable ? Ne vais-je pas aggraver ma blessure ? Je suis à la Réunion, le relief n’est pas celui de Givray ou du Bois de Saint Pierre. Mes pensées se bousculent, ma tête me dit de continuer et mon corps souhaite se préserver de blessures plus graves. Je me restaure et vois plusieurs coureurs doublés repartir. Malgré la difficulté de ce raid, je me dis : « ils ont de la chance ». Je me rends à la table de chronométrage et je leur dis « je m’arrête  là »…Je ne peux prononcer le mot « abandon », c’est trop dur de s’arrêter si près du but. J’en suis persuadé, j’avais tout fait bien : la longue préparation, l’alimentation, la gestion de ma course et j’y étais, oui j’y étais presque …Une personne me retire la puce de mon dossard ainsi que ma plaque d’identification attachée à mon sac. Je suis vidé. J’ai pris, j’essaye de m’en persuader encore aujourd’hui, la décision la plus sage dans un souci d’intégrité physique. Mais que c’est dur à accepter ! Que c’est dur d’être si près du Graal et d’échouer. Dossard 2319 – ma diagonale est terminée mais non aboutie. Peut-être une prochaine fois !

FRANCK BROCHAIN- DOSSARD  2319 - MA DIAGONALE DES FOUS -
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18 décembre 2018 2 18 /12 /décembre /2018 14:23
89ème sur 2800  en 35h08'34"

89ème sur 2800 en 35h08'34"

Jeudi 18 octobre 20h30, me voilà au départ de la Diagonale des Fous parmi plus de 2800 coureurs. Je fais un point juste avant le départ. Je me suis bien reposé, en forme, et surtout entièrement satisfait de ma préparation. J’ai le sentiment d’en avoir fait le maximum, sans en faire trop. Les quelques pépins physiques que j’ai eu au fil de la préparation ne l’ont pas impactée et sont désormais oubliés. L’attente des derniers jours était longue, maintenant j’y suis, prêt comme jamais.

22h, le départ est donné, c’est parti pour la traversée del’île ! Je suis plutôt bien placé, à environ 20m de la ligne de départ, je dirais autour de la 500e place. Les premiers kilomètres sont incroyables, des milliers de personnes bordent la route et nous encouragent. Très vite le parcours s’éloigne du front de mer et prend la direction des montagnes. S’ensuit une longue ascension de 40km et 2000m D+, peu pentu et peu technique, idéal pour débuter la course. Au milieu les champs de cannes à sucre, les kilomètres passent vite. Après une heure de course je regarde ma montre, 10km. J’ai l’impression d’être tout juste parti, c’est bon signe. Les sensations sont bonnes, ça s’annonce bien. Je passe au premier ravitaillement, Domaine Vidot, puis au second, Notre Dame de la Paix puis au troisième, aire nez de bœuf. Je m’y arrête peu, entre deux à trois minutes, juste de temps de refaire le niveau de mes flasques et de prendre un verre d’eau. Pour ne pas me laisser impressionner par la distance, je ne me représente pas la course dans son ensemble mais comme une succession d’étapes dont chaque ravitaillement marque la transition de chacune d’entre elles.

Sur ce début de course, je me force à garder un rythme tranquille car comme certains disent, la course commence à Cilaos, au 65e km. J’essaierai donc d’y arriver le plus frais possible. Malgré tout, depuis le début de la course je reprends petit à petit des places. Après environ 6h d’effort, je termine cette longue ascension et m’engage sur la première descente avant d’arriver au

"MARE A BOUE"

ravitaillement de Mare à Boue. Cette année, par chance, cette partie est sèche et donc très agréable à traverser. Je continue, et c’est une belle ascension qui s’annonce dans les coteaux de Kerveguen. La montée n’est pas facile, c’est pentu et rocailleux, mais le soleil se lève et je découvre que je traverse

REMPARTS VERTIGINEUX EN MONTANT SUR KERVEGUEN

de magnifiques paysages. Je parviens en haut et bascule dans le cirque de Cilaos, s’annonce alors une descente jusqu’à la base de vie. Bien qu’étant un adepte de la descente, celle-ci je la redoute. 2 km de descente et 750m de dénivelé négatif, c’est rude. Il y a des passages très raides, certains avec des échelles.


 

CIRQUE DE CILAOS : VUE DEPUIS LE SOMMET DE KERVEGUEN

Je prends mon temps, tout va bien mais je commence à sentir que les cuisses subissent un peu. Sur cette portion certains coureurs me doublent avec une aisance déconcertante.

CILAOS

Je n’essaie pas de les suivre au risque de le regretter dès les prochaines côtes. La descente se termine et me voilà aux abords de Cilaos. J’arrive au stade, je récupère mon sac à la base de vie et me pose sur le stade, après un peu plus de 10h de course. Mise à part cette dernière descente, je me suis bien économisé et je reste confiant pour la suite. Après 30 minutes de pause consacrés à manger et me changer, je repars propre et en forme. C’est le moment de s’attaquer l’ascension du Taïbit avec ses 1200m de D+ sur 6 km. Il fait maintenant très chaud, je veille donc particulièrement à mon hydratation car je sais que c’est un point essentiel. Je prends un rythme constant, surtout ne jamais m’arrêter. Je vois les premiers signes de fatigue autour de moi, certains s’arrêtent et commence à avoir des crampes. Je suis l’aise en montée, et dire qu’il y a six mois c’était mon point faible, je me suis tellement concentré à améliorer ce point qu’aujourd’hui c’est l’inverse !
 

RAVITAILLEMENT AU PIED DU COL DU TAIBIT
RAVITAILLEMENT AU PIED DU COL DU TAIBIT

RAVITAILLEMENT AU PIED DU COL DU TAIBIT

P'TIT BON DIEU JUSTE AVANT L'ARRIVEE AU COL DU TAIBIT

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Je passe le col du Taïbit, et là je vois…une mer de nuage. Dommage, je vais devoir attendre encore un peu pour découvrir le cirque de Mafate. Je redescends jusqu’au village de Marla où un ravitaillement m’attend. Après une courte pause, je repars et j’entame peu après la montée jusqu’au col de bœufs. Le col franchit s’ensuit une descente de 14km et 1100m de D-. Je me retrouve à suivre un coureur dont le rythme me convient bien, qui m’accompagnera au cours des trois prochaines heures. On avance bien dans cette descente, les sensations sont bonnes.

SENTIER SCOUT : montée vertigineuse vers les Deux Fesses et le Grand Rhein

Je vois à ma montre que la mi-course vient d’être passée, c’est encourageant et motivant car jusqu’à présent tout va bien. L’euphorie que je ressens à ce moment ne va pas durer, car quelques kilomètres plus loin, subitement plus rien. Mon corps me lâche, je suis victime de la chaleur et d’une grande fatigue musculaire. J’atteins péniblement le ravitaillement Ilet à Bourse, au 97e km. Je prends quelques minutes pour me passer sous l’eau et reprendre mes esprits. Puis je me remets en route, c’est difficile mais j’ai tout de même un peu moins chaud. Je m’étais préparé à avoir un tel coup de fatigue, j’ai déjà connu ça pendant ce type d’effort. Je m’accroche, j’oblige mes jambes à avancer coûte que coûte, je sais que la forme va revenir. Alors que je pense revoir passer devant moi bon nombre de coureurs, ce n’est pas le cas. Je m’aperçois que ceux qui m’entourent sont dans le même état que moi, voire pire.

MONTEE VERS ROCHE PLATE : PITON CABRI (au centre du Cirque)

Je continue difficilement, prochain ravitaillement à Grand Place, dans trois kilomètres. La progression est compliquée mais j’y arrive déjà un peu mieux. Les pauses commencent à être plus longues, depuis que je ressens le besoin de m’asseoir à chaque ravitaillement elles approchent des 10 minutes. Je repars, et après quelques kilomètres j’entame la montée au Maïdo, soit 1500m de D+ en 11km. Après  500m de D+, le ravitaillement de Roche Plate me permet de faire une pause dans cette montée interminable. Pour la première fois les bénévoles m’annoncent ma place, 89e. Belle surprise, ça fait du bien au moral après ces 3 dernières heures très difficiles. Ça commence à aller mieux, je repars et me retrouve à nouveau seul, la nuit est tombée. Je sens que je suis revenu dans un état suffisamment bien pour aborder la dernière partie du Maïdo, la plus raide et la difficulté majeure de la course. De plus, la nuit m’évite de passer cette partie sous un soleil de plomb comme ce sera le cas pour beaucoup de coureurs, un avantage considérable. Je rattrape un petit groupe auquel je me greffe. On s’arrête quelques secondes à chaque quart de la montée, indiquée par une marque sur des rochers. Ça permet de souffler un peu et de faire passer un peu mieux l’effort, qui durera tout de même 2h15 sur cette dernière partie. Je vois au loin une lumière en haut du Maïdo, c’est le col que je dois franchir et où du monde doit probablement encourager les coureurs. Ça semble tellement loin…je me reconcentre pour ne plus y penser et me replonger dans ma bulle. L’ascension terminée, je relance sur le sentier maintenant plat jusqu’au ravitaillement. Que c’est dur pour les jambes, je n’arrive plus à avancer. Je me ravitaille rapidement et entame la descente jusqu’à la prochaine base de vie, au village de Sans-Souci. 13km et 1600m D-. Elle me parait interminable avec ses innombrables marches qui commencent à me faire mal aux pieds. Je commence à ne plus les supporter, je n’en ai jamais vu autant sur une course, il y en a des milliers !

J’arrive enfin à la base de vie après 25h de course. Je me pose quelques minutes en profitant des crêpes que nous préparent les bénévoles, un régal. Ça fait un bien fou à la tête et au corps. Je me dirige ensuite vers les tentes où je récupère mon sac contenant vêtements et ravitaillement personnel. Un podologue voit mes pieds et me convainc de prendre quelques minutes pour y apporter des soins. J’accepte, un peu plus de confort pour les 50 derniers km ne sera pas de trop. Et puis c’est l’occasion de m’allonger 10 minutes, c’est déjà ça. Je repars après 30 min de pause. Je m’étais imaginé dormir un peu à cette base de vie mais je n’ai pas sommeil, donc je continue. Une douleur à une cheville apparait, elle est due au frottement de mon manchon de compression sur la malléole, ce qui me vaut un bleu. Je ressens la douleur à chaque pose de pied, il reste 50km, ça me parait tenable. J’arrive tout de même à garder un rythme correct. Je traverse la rivière des galets, une épreuve que je tiens à réussir pour ne pas finir la course avec les pieds mouillés. C’est bon ! Et c’est parti pour une montée jusqu’à Dos d’Ane, 600m de D+ en 10 km. Alors que je termine juste la côte, la fatigue arrive d’un coup. Je me sens complètement épuisé, c’est maintenant la tête qui a besoin de repos.  C’est une nouvelle course qui débute. Je devrais peut-être dormir quelques minutes, mais l’idée ne me traverse même pas l’esprit. J’ai parcouru 135km, Il en reste 30, j’ai l’impression d’y être presque… en réalité je mettrai plus de 7h pour terminer. Débute alors une lutte de chaque instant dans ma tête. Je savais que la fatigue serait une des grosses difficultés pour moi. N’ayant jamais couru si longtemps, je suis dans l’inconnu. Pour m’aider à m’accrocher dans cette situation je me suis fixé une règle, qui consiste simplement à m’interdire d’abandonner quelle que soit mon état physique et mental. Ça m’a déjà été utile par le passé, maintenant également car je me rends compte que c’est ce qui me permet de passer au-delà de toutes les difficultés auxquelles sont sujets mon corps et mon esprit. Il y a d’un côté l’envie de tout arrêter pour pouvoir dormir et quitter cet état de fatigue et de douleur tellement inconfortable. Et de l’autre cette voix au fond de ma tête, que je ne contrôle pas et qui me pousse à avancer encore et encore. Dans ces moments, je pense aussi à celles et ceux qui me suivent, dont certains espèrent au moins autant que moi me voir franchir la ligne d’arrivée. C’est alors que je poursuis ma course avec la descente du chemin Ratinaud, le sentier de la Kala avant d’atteindre  le ravitaillement de la Possession.

La portion suivante n’est pas évidente non plus, il s’agit du chemin des Anglais, une voie pavée vallonnée longue de 6 km.

CHEMIN DES ANGLAIS CHEMIN DES ANGLAIS

CHEMIN DES ANGLAIS

Comme tous les chemins depuis quelques heures, ça me parait interminable. L’avantage avec la fatigue, c’est que désormais les douleurs physiques sont secondaires et très atténuées. La pluie commence à tomber, le jour se lève, et j’arrive au ravitaillement de la Grande Chaloupe. Je repars rapidement pour me confronter à la montée du Colorado, 9km et 900m de D+. C’est la dernière, mais que c’est difficile, je n’en vois pas la fin…je commence même à avoir quelques légères hallucinations, ce qui ne m’inquiète ni me surprends pas, je savais que ça pouvait arriver. Après près de 2h30 d’ascension j’atteins le sommet et m’engage dans la dernière descente, 5km jusqu’à l’arrivée. Une fois encore, ça me parait très long, jusqu’à ce que je retrouve la route toute proche de l’arrivée au stade. Il est 9h du matin, il fait à nouveau très beau, les conditions sont excellentes pour terminer cette belle et difficile course. J’entre dans le stade puis franchis la ligne après 35 heures,  8 minutes et 34 secondes de course, en 89e position.

A ce moment une seule chose me vient en tête : je l’ai fait !

ARRIVEE SUR LE STADE DE LA REDOUTE
ARRIVEE SUR LE STADE DE LA REDOUTE

ARRIVEE SUR LE STADE DE LA REDOUTE

Pas d’émotions fortes, pas de larmes, pas d’effusion de joie, je suis trop épuisé pour ça. Juste la satisfaction d’en avoir terminé, d’avoir franchi cette ligne à laquelle je n’ai cessé de penser au cours de ces 8 dernières heures.


 

DIAGONALE-DES-FOUS-2018-CLEMENT-MOUSSET- Retour sur ma traversée de la Réunion, récit d’une belle et difficile aventure :
DIAGONALE-DES-FOUS-2018-CLEMENT-MOUSSET- Retour sur ma traversée de la Réunion, récit d’une belle et difficile aventure :

Bilan à froid :

Au terme de cette aventure, c’est une grande satisfaction qui qualifie le mieux ce que je peux ressentir. Celle d’avoir osé me lancer à moi-même cet incroyable défi, celle d’avoir fait le maximum pour me préparer du mieux que je le pouvais, et bien sûr celle d’être parvenu à franchir la ligne d’arrivée après avoir fait une course dont je n’aurais pas pu espérer meilleur résultat. Un résultat dont je suis très content mais qui en réalité n’était pas l’objectif principal, du moins pour cette première expérience, tant la dimension humaine prend une part importante. Que ce soit d’un point de vue personnel, avec le fait de me dépasser, de gérer mes émotions, d’apprendre à me connaitre un peu plus, de sortir de ma zone de confort…mais aussi avec le partage présent du début à la fin de ce projet, à commencer par la préparation et les entrainements avec des gens aussi formidables que passionnés. Et pendant la course, avec les nombreux spectateurs qui encouragent chaque coureur comme s’il était un champion, ainsi que les bénévoles qui font leur maximum pour nous mettre dans les meilleures conditions possibles. Et enfin les coureurs eux-mêmes qui n’hésitent pas à se soutenir et s’entraider tout au long de la course. A mon sens, cette aventure n’est en rien un aboutissement comme je me l’étais imaginé il y a quelques années, mais bel et bien une première expérience tout à fait concluante

DIAGONALE-DES-FOUS-2018-CLEMENT-MOUSSET- Retour sur ma traversée de la Réunion, récit d’une belle et difficile aventure :DIAGONALE-DES-FOUS-2018-CLEMENT-MOUSSET- Retour sur ma traversée de la Réunion, récit d’une belle et difficile aventure :
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22 octobre 2018 1 22 /10 /octobre /2018 19:00

Samedi dernier je franchissais la ligne d'arrivée sur le stade de la Redoute à Saint Denis, ce qui marquait la fin de ma plus belle et difficile aventure, la Diagonale des Fous.
Je tiens à remercier toutes les personnes qui m'ont permis de concrétiser cet objectif qui me tenait à cœur.
Je pense notamment à celles et ceux avec qui j'ai partagé de bons moments sur la piste, sur les sentiers ou sur tout autre course ou sortie. Également celles et ceux qui ont partagé leur expérience, apporté de nombreux conseils qui m'ont été d'une grande aide pour préparer cette épreuve qui m'était inconnue.
Bien sûr toutes celles et ceux qui m'ont fait part de leur soutien et encouragements au quotidien depuis un an ainsi que tout au long de la semaine dernière avec un incroyable engouement. Et je pense bien fort à celles et ceux qui m'ont demandé de les faire rêver le temps d'une course, et pour qui je savais que je ferai tout pour arriver au bout, me rendant compte de la chance que j'avais de prendre ce départ.
Mention spéciale à Christian Baigue qui a été exceptionnel tant par la qualité de sa préparation que par son suivi et ces précieux conseils, à qui je dois beaucoup et sans qui le résultat n'aurait pas été à la hauteur de ce qu'il est aujourd'hui.
Merci pour tout, je garderai un grand souvenir de cette première sur la Diagonale des Fous, à mon sens l'exemple même des magnifiques valeurs qui rendent le sport si beau !
Je ferai probablement un récit détaillé dans les prochains jours 😀

DIAGONALE DES FOUS 2018 - CEMENT MOUSSET - PETITE REACTION A CHAUD
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26 septembre 2018 3 26 /09 /septembre /2018 21:42
CLEMENT MOUSSET : PREPA-DIAGONALE DES FOUS 2018 - WEEK-END CHOC SUR LES MONTS DU CANTAL

Retour sur un excellent week-end en Auvergne. Trois jours passés à parcourir la montagne

sur les sentiers du Massif du Cantal, un de mes derniers gros entrainements avant le départ pour la Réunion. Je connais peu le coin, alors pour un guidage plus aisé j’organise mes parcours en fonction du balisage existant, à savoir les traces du GR400, ce qui me qui permet de découvrir l’ensemble des Monts Cantaliens.

De très belles sorties au programme, des paysages magnifiques en continus, et le tout avec des conditions météo idéales, temps frais et ensoleillé. Les chemins sont variés, techniques pour certains, plus roulants pour d’autres, quelques traversées de beaux villages, et peu de routes. Avec bien sûr des passages incontournables, telle la montée du Puy Mary (ci-dessus), celle du Plomb du Cantal ou encore du Puy Griou.

La plus grosse difficulté est arrivée en toute fin de werk-end : le chemin de crêtes menant au sommet du Plomb du Cantal, près de 2h sous des rafales d’une force impressionnante et des températures excessivement basses !

Ayant testé dernièrement les bienfaits de la récupération par l’eau froide, je décide de me rafraichir les jambes dans la rivière après chaque sortie. Très efficace, je repars à chaque fois comme au premier jour!

Au final, des sorties qui rassurent.  La forme est là, les sensations sont bonnes et le plaisir au rendez vous du début à la fin. De bonne augure pour la suite des évènements.

JOUR 1

 

JOUR 2

 

JOUR 3

 

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10 septembre 2018 1 10 /09 /septembre /2018 20:35

Au programme cette fois 123 km et 7200m de D+ ! Avant le départ j’ai toujours dans la tête ma très mauvaise expérience de l’UTPMA où j’avais galéré comme jamais pendant 109 km mais cette fois ça sera différent et me permettra de vérifier que l’on apprend plus de ses échecs que de ses succès. Je pars là pour une distance encore plus longue avec encore plus de dénivelé mais dans un coin que je connais très bien et avec certaines parties que j’avais reconnues quelques semaines avant.

Départ le vendredi 9h avec les copains de l’EPA, je me sens bien j’ai bien

dormi et je ne suis pas fatigué. On part sur un bon rythme car on va faire la première montée de 5 km et 700m de D+ en 1h, je suis en compagnie d'Anne, Christian, Patrick et Manu qui a quelques soucis de chaussettes , on passe le premier ravitaillement en 1h30 pour 9 km et on repart pour la montée suivante, j’ai de bonnes jambes mais j’essaye de ralentir un peu pour en garder. À la descente

suivante je prends un peu d’avance sur le groupe de

l’EPA, je me sens super-bien en descente je ne force pas ça va tout seul !Deuxième ravitaillement à Gèdre au 25ème km, je repars seul, les autres sont juste derrière moi. Sur les 13 km qui vont nous emmener à Gavarnie je vais cool, il fait chaud et je veux toujours en garder je sais que c’est encore très long !

A Gavarnie je vois Christian qui est là, mince j’ai compris… sa douleur au pied l’aura forcée à abandonner … Je suis 192ème, je me ravitaille et Patrick arrive 5 min après. Je décide de repartir avec Patrick, j’en ai un peu marre d’être seul. On monte a un bon rythme je ne sens toujours aucune faiblesse dans mes jambes on passe le refuge des Espugettes puis les 400m de d+ qui nous amènent à la Hourquette d’Alans ou l’on va basculer sur le cirque d’Estaubé pour revenir vers

Gèdre. Dans cette longue descente je sème Patrick qui est un peu moins à l’aise, je double des dizaines de coureurs et j’arrive au ravitaillement suivant, je pointe à la 148 ème place. Je profite de faire un ravitaillement plus copieux pour éviter ce que j’avais subi a l’UTPMA, la nuit arrive, je me couvre bien et je repars le moral à bloc, j’ai des super jambes je ne suis pas fatigué j’ai pris un énorme plaisir dans ce début de trail je sens que ça va le faire !

 

La nuit est tombée, 30 min plus tard dans une bosse très raide, j’ai très mal au ventre j’ai envie de vomir, je ne digère pas quelque chose, je ne m’affole pas, une petite pause au bord du chemin de 15min (pas trop car il fait froid) et je repars doucement avec un petit groupe, j’arrive à Luz-Saint-Sauveur on est au km 75 je suis 130ème, je fais une pause de 30 min à la base de vie. Je refais le plein je

change de chaussettes, je m’alimente bien mais je ne veux pas rester trop longtemps, je ne suis pas fatigué donc je repars. Il commence à faire froide, le nuit sera longue avec des passages compliqués comme la mer d’éboulis pour rattraper le refuge de la Glère ou je passerais en 90 ème position.

Le jour se lève après le passage de Tournaboup, à partir de là je vais gérer et garder ma position. Les jambes serons de plus en plus dures au fil des heures mais rien de bien inquiétant, la dernière descente arrive je la connais bien, puis ce panneau annonçant les 1800 derniers mètres et enfin l’émotion du passage sur la ligne. Voilà c’est fait ! Déjà ! Je fini 89 ème/580, Je n’ai pas vu passer ce trail, il est à l’opposé de ce que j’ai pu vivre sur l’UTPMA, je l’ai traversé avec une facilité qui m’interroge.

Ça restera pour le moment mon plus beau trail autant pour les paysages que pour les sensations que j’ai eues, j’ai pris un plaisir énorme surtout sur les 100 premiers km. Le retour à la vie ordinaire à Poitiers est difficile après toute cette agitation, l’ambiance d’avant et d’après trail avec les copains de l’EPA, l’excitation de la compétition. En conclusion de mon retour de l’UTPMA j’avais dit que cette expérience me servirait et ce fut vraiment le cas pour ce qui sera ma plus belle expérience de trail

PIERRE CHANSIGAUD - Retour sur le GRP2018 -Tour Des Cirques--123km- 7200m D+ et 8000 D-
PIERRE CHANSIGAUD - Retour sur le GRP2018 -Tour Des Cirques--123km- 7200m D+ et 8000 D-
PIERRE CHANSIGAUD - Retour sur le GRP2018 -Tour Des Cirques--123km- 7200m D+ et 8000 D-
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3 septembre 2018 1 03 /09 /septembre /2018 20:50

Vendredi 25 aout 9h, départ de Piau. Après une descente de 800m, j'attaque une montée de 4.9 km pour 770m de D+ pour arriver au sommet de Piau à 2 526m d'altitude. Dur le départ, je pars sur un bon rythme sans jamais me mettre dans le rouge. La balade est encore longue. Je me retrouve rapidement

seul. Je récupère Patrick au 1er ravitaillement (retour sur la station de Piau).

Pas pour longtemps. Il me lâche rapidement dans la 2ème ascension vers le port de Gambiel - 500m de D+ sur 3 km pour arriver à 2 596m d'altitude avec un passage neigeux sur 50m. Je monte à mon rythme et m'émerveille des paysages. Je m'arrête même plusieurs fois pour faire des photos. Au sommet, c'est tellement beau que je m'attarde 5mn pour contempler le site.
Nous attaquons alors 10 km de descente pour 1 600m de D-. Au bout de 8km les cuisses commencent à piquer et j'arrive au ravito de

Gèdre avec des crampes en haut de la cuisse droite. Je ne suis qu'au 25ème km. Le moral en prend un petit coup, il me reste encore 100 bornes à faire. Je retrouve Maryvonne, Eric et Manu qui par leurs messages me reboostent. Je me restaure un peu et repars avec mon Phiphi. J'ai oublié d'envoyer un message à mes proches pour les rassurer. Je m'arrête pour envoyer un sms et demande à mon compagnon de ne pas m'attendre. Je repars et croise Kiki - abandon - son pied blessé l'a laché - Merda ! Je suis deçu pour lui mais je

me remets rapidement dans la course. La douleur à la cuisse est passée au bout de 2 km et je me fixe d'arriver à Gavarnie avec 2h d'avance sur la barrière horaire. Quelle beauté ce cirque avec ses grandes cascades. Un décor à couper le souffle. J'arrive dans la ville avec 1h56mn d'avance. Manu, Kiki et Maryvonne sont là pour nous encourager. Cela fait énormément de bien. Je prends une petite soupe locale et des pâtes, le plein d'eau et je repars avec Pascal. Nous montons ensemble jusqu'à Hourquette d'Alans (2 430 m d'altitude - 960 m de D+ en 10 km). La montée est compliquée et je gère chacun de mes pas. Nous croisons de somptueux chevaux noirs de Mérens aucunement effrayés par tous ces coureurs et randonneurs.
Le retour sur Gèdre se fait de nuit. Je suis à mi-parcours avec un peu plus de 2h d'avance sur la barrière horaire. Bonne surprise - je

croyais être à la ramasse. Cette fois ci, pas d'accueil, il fait nuit et je n'ai qu'une obsession atteindre la base de vie à Luz Saint Sauveur. Je repars donc assez rapidement en oubliant Pascal persuadé qu'il est devant moi. Je passe rapidement Phiphi qui se couvre chaudement et après 4h d'effort j'atteinds Luz - il est 3h22. Premier objectif - récupérer rapidement mon 2ème sac. Je recharge ma frontale et commence à me changer. Je fouille partout, grosse boulette, j'ai oublié de prendre une seconde paire de chaussettes. Je quitte celles que j'ai, les étend pour les sécher. Je me lave les pieds et vais voir les podologues pour des soins - une grosse ampoule s'est ouverte sous mon pied droit. Un jeune homme à la carrure de rugbyman bichonne mes petons - il en profite également pour traiter mon pied gauche qui commence à cloquer. Je suis arrêté depuis 50mn. Je pars me restaurer et aperçoit Pierre H qui fait de même. J'essaye de me reposer 20mn - impossible. Je repars donc seul après 1h30 d'arrêt avec les pieds guéris mais sans avoir pu dormir (cela fait 19h50 que je suis parti).Je n'ai plus que 1h25 d'avance sur la dernière barrière horaire.
La reprise est difficile - 940 D+ en 8km jusqu'au prochain ravito. J'y arrive de jour au bout de 2h45. Une petite cabane avec 2 dames et un monsieur très gentils nous y accueillent. Je prends un café, m'étire les jambes pendant 5mn et je repars. Le sommet du Sarrat de Largues n'est qu'à 4km mais avec 600m de D+. En repartant de la cabane, se dresse une mer de rochers sur 300m - mais qui c'est le con qui les a déversé ! Son franchissement m'est difficile avec mes chevilles de verre. Je suis extrêmement prudent. Après ce passage périlleux, je monte à un petit rythme tellement le pourcentage est important et les rochers de plus en plus nombreux. En haut je ne m'attarde pas. Plusieurs traileurs exténués

reprennent leur souffle. Je vois le prochain ravito du sommet et me force à l'atteindre sans

m'arrêter. Ce refuge de la Glere est le bienvenu. Je m'installe sur un banc- me restaure face à un lac de montagne et je contemple la vue. J'y retrouve Pierre H installé depuis peu. Je repars au bout de 10 mn pour descendre jusqu'à Tournaboup (station de ski). Le soleil tape fort,il fait très chaud. Il est 11h45 et je me retrouve à ce ravito au 94ème km avec Pierre H, Phiphi et Pascal avec 2h15 d'avance. J'ai gagné du temps et repars seul le moral reboosté.


Nous sommes déroutés du col de Barèges (plainte déposée par une association locale) pour accéder à un col à la même altitude 2 460m dont j'ai oublié le nom - l'ascension est compliquée avec la chaleur. Je gère chacun de mes pas. Mes ampoules se sont rouvertes sous les 2 pieds et il me reste 25km à parcourir. Je serre les dents et je me fixe des objectifs visuels - un arbre au loin, un lac, une cabane...Je suis focus sur cette routine perso. Arrivé au sommet sous un ciel très dégagé, je me pose 5mn et contemple les lacs en contrebas. J'aperçois même 2 vautours d'une envergure impressionnante qui planent majestueusement dans les airs. Personne de mes compagnons d'infortune ne les ayant vus, je me pose encore aujourd'hui la question : " Les ai je réellement aperçus ? ". Nous sommes le samedi 25 aout 16h30 et cela fait 31h30 que je suis parti. Je descends vers la cabane de Lude où les coureurs du 80km ne cessent de nous doubler. De vrais cabris domptant la descente pierreuse et piégeuse avec une aisance déconcertante. Clément me double comme une bombe puis Eric un peu plus tard. Le premier

lucide et facile me lance des mots d'encouragement réconfortants. Pour le second un peu plus dans le dur c'est moi qui le félicite de sa performance - malheureusement on se retrouvera un peu plus tard. J'arrive à la cabane de Lude et je m'arrête pour me couvrir. J'échange quelques

mots avec un petit papy local qui m'aide à sortir les affaires de mon sac et à m'habiller. Il me lance "Vous avez pris cher sur le 120, vous êtes plus marqués que ceux du 160". Sur ces mots, je repars et je me dis "je dois avoir une sale gueule".
Dans la montée vers le restaurant Merlans, il commence à faire froid. J'y arrive dans le brouillard et le vent. Je prends une soupe de potirons et m'installe sur une chaise. C'est alors qu'Eric m'accoste et me raconte ces péripéties - grosse entorse avec surement arrachement ligamentaire. Il est strappé et fait un essai pour repartir mais revient rapidement - abandon. Je suis déçu pour lui, il était à rien d'être finisher du GRP 80. J'aperçois ensuite Maxime qui fait une très belle course sur le 80 km. Je discute avec des accompagnateurs qui suivent leur fils également sur le 120km. Je ne vois pas le temps passé et repars au bout de 20mn. Maxime est déjà reparti. Je me suis refroidi et je grelotte sur les 2 derniers km de l'ascencion vers le col de

Portet (2 215m). Il me reste alors 12km de descente à parcourir et le brouillard est bien présent. Je me force à trottiner mais c'est vraiment laborieux. J'installe ma frontale, il est 19h30.
Je me fixe d'arriver à 22h - je sais que c'est fini et que je vais être finisher. Je marche le plus souvent et avec le brouillard, je distingue des formes qui me paraissent énormes. Ceux sont des vaches. J'ai l'impression qu'elles font le double de celles que l'on peut voir dans nos champs poitevins. Je les trouve belles - toutes blanches, le contour des yeux noirs et des énormes cornes. J'ai fait des recherches cette race s'appelle la vache Gasconne. Elles sont au milieu du chemin et ne semblent pas perturber par ma présence. Elles sont imposantes mais elles ne me font pas peur. Je ne fais pas d'écart et je passe au milieu d'elles à la pointe de leur mufle. Je suis seul avec elles, il commence à faire nuit, il y a du brouillard et je suis bien. Aucun problème musculaire - je gère tant bien que mal la douleur des ampoules sous mes pieds. Je souhaite désormais en terminer rapidement. J'attaque alors la descente raide vers Soulan. Mes jambes s'emballent, j'ai peur de m'étaler sur le chemin pierreux et pour m'arrêter je plonge dans les buissons de myrtilles sur ma droite. Je me relève, je n'ai rien. Je repars en marchant jusqu'à Soulans et ne cesse de me freiner pour ne pas prendre de vitesse.
J'arrive alors dans le village et j'attaque en marche rapide la descente par la route vers Vielle Aure. Je me dis " Super ! si c'est que de la route jusqu'à l'arrivée, plus de risque de chutes". Fausse joie, à la sortie du village je prends un chemin large sur ma droite, il descend en lacets jusqu'au prochain pointage. Je reprends confiance et me surprend à trottiner sur certaines portions. J'arrive à Vignec, il reste 1 600m à parcourir et il est 21h53. L'arrivée à 22h n'est plus jouable mais j'y suis. Je commence à courir sur la partie route, mais je reviens rapidement à la marche rapide. 800m - 400m - 200m, ce final est interminable. Je vois au loin une petite bosse et au sommet la foule qui applaudit les coureurs. Fièrement je me remets à courir jusqu'au passage de la ligne d'arrivée. J'ai l'impression qu'ils sont des milliers à m'applaudir et certains scandent mon prénom inscrit sur mon dossard.

Quelle émotion ! Je passe l'arrivée puis je fonds en larmes. Putain, je l'ai fait. Je suis finisher de cette diablesse. Je reprends mes esprits puis m'avance vers une jeune fille qui me passe une médaille autour du cou. J'avance encore on me demande ma taille - M et on me donne une veste de finisher. Je me pose sur un banc, je suis seul parmi les traileurs finisher et je reste là 10mn sans rien faire - la décompression totale. Je suis bien et léger. Le temps de course, je m'en fous, j'ai atteint mon objectif, traversé de somptueux paysages et c'est tout ce qui m'importe.

Je suis finisher de mon premier ultra trail.

Un grand bravo aux bénévoles rencontrés tout au long du we par leur dévouement et gentillesse extrêmes. Un grand merci aux accompagnateurs qui par leur présence et leurs mots d'encouragement ont eu un énorme impact sur mon moral. Bravo également à tous les finishers du we - Repos et soins pour les blessés. Et enfin un petit mot pour mes proches : "Non je ne suis pas fou, je suis simplement amoureux de la nature, des paysages montagnards et par le trail j'assouvis à la fois mon besoin de faire du sport, de ressentir des émotions particulières et de m'émerveiller comme un enfant à la vue de superbes paysages".

FRANCK BROCHAIN - MON PREMIER ULTRA TRAIL - GRP TOUR DES CIRQUES -123km 7200m D+ 8000 D-
FRANCK BROCHAIN - MON PREMIER ULTRA TRAIL - GRP TOUR DES CIRQUES -123km 7200m D+ 8000 D-
FRANCK BROCHAIN - MON PREMIER ULTRA TRAIL - GRP TOUR DES CIRQUES -123km 7200m D+ 8000 D-
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Profil

  • Kiki 86
  • FINISHER  : Diagonale des Fous à La Réunion 2002, 2007,1010 et 2012  ou je me classe 1er V3 , 2017, 2021 et 2022 avec ma fille Céline
UTMB : 2008 et 2011 
Marathon des Sables 2010
Objectif : 2023 : Senpereko Trail - Montan'Aspe - Trail des Cathares
Date de naissance : 28/08/1952
  • FINISHER : Diagonale des Fous à La Réunion 2002, 2007,1010 et 2012 ou je me classe 1er V3 , 2017, 2021 et 2022 avec ma fille Céline UTMB : 2008 et 2011 Marathon des Sables 2010 Objectif : 2023 : Senpereko Trail - Montan'Aspe - Trail des Cathares Date de naissance : 28/08/1952

L'ULTRA POUR HORIZON

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PALMARES

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DERNIERS RECITS D'ULTRA-TRAILS

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L'ÎLE INTENSE "LA REUNION"

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° RANDOS ET RANDOS-TRAILS SUR L'ÎLE DE LA REUNION    ....."ENTREZ et DECOUVREZ"

 

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WIDY GREGO "SPORTIF DE L'HUMANITAIRE"

Mes Entraineurs

Roger PASSARD : Professeur d'Education Physique et Responsable de l'ALERTE GRAYLOISE, qui de cancre en sport m' a propulsé en deux ans "Champion Départemental Minime de Cross" à PORT SUR SAÔNE

Jean-Pierre GORGEON : Co-équipier et Entraineur à l'ASPTT POITIERS m'a permis de réaliser :

  • 15'48"70 sur 5000m, le 14/06/1997 lors des Championnats Régionaux à NIORT (45ème Perf Nationale V1et 5ème M45)
  • 33'42"60 sur 10 000m le 31/05/1998 lors des Championnats de France Vétérans sur Piste à LYON PARILLY ( 21ème Perf Nationale V1 et 6ème M45)
  • 2h40'46" au Marathon le 12/10/1997 lors des Championnats de France de Marathon à REIMS (95èm Perf Nationale V1 et 31ème M45)

Jean-Claude FARINEAU : avec qui j'ai partagé depuis 1984, les charges, parfois lourdes de Dirigeant à l'ASPTT POITIERS, puis au PEC à partir de 1999. Grâce à ses entrainements judicieux, je n'ai jamais raté une qualification aux Championnats de France de 10 km

Jean-Paul GOMEZ :
Finaliste Olympique du 10 000m à MONTREAL en 1976 : Bien que ne m'ayant jamais entrainé m'a toujours apporté des conseils éclairés, notamment lorsqu'il entrainait  à mes côtés l'école d'Athlétisme de L'ASPTT